Le philosophe, paraît-il, doit faire preuve de retenu, doit être rigoureux et efficace. Son originalité réside souvent en sa capacité à choisir des sujets peu habituels, dont les gens n'ont pas l'habitude d'entendre parler. La clarté et la précision est de mise afin d'être compris du plus grand nombre. Souvent, le philosophe aime bien réhabiliter les vaincus, ce que la postérité n'a pas parfois pas gardé en mémoire. Une chose est toutefois certaine : les philosophes peuvent dire des choses vrais, des choses fausses et des choses qui n'ont aucun sens. De fait, un philosophe peut-être victime d'erreurs et d'illusions. Il se pose des questions basiques à l'observateur extérieur : Quels sont les arguments d'un philosophes ? Ces arguments sont-ils vrais ou faux ? Une idée est véhiculée souvent : celle de dire que les philosophes ne peuvent se contredire car ils ne parlent pas de la même chose... Cela est bien sûr faux... Qu'ont en commun Kant et Onfray ? Rien, si ce n'est le titre de “philosophe”. Onfray obtient même, parfois, le pompeux statut de “philosophe national”.
Pour Jacques BOUVERESSE, il faut prendre les philosophes au pied de la lettre et non leur attribuer des choses qu'ils n'ont pas penser, pas écrite... La controverse qu'il y a eu après la publication du Crépuscule d'une idole de Michel ONFRAY est à ce titre assez significative. ONFRAY s'est permis d'affirmer des choses qu'il est impossible de prouver historiquement. Pour BOUVERESSE, il faut donc critiquer, débattre, tout expliquer. De plus, il est nécessaire de clarifier le vocabulaire et la logique de chaque paragraphe. Le rôle de l'écriture, de la sémantique, est donc fort important. Il se pose, comme en histoire d'ailleurs, la question de la vérité philosophique. Or, il se pose deux problèmes de fond : 1/est-ce vraiment un vérité ? ; 2/existe t-il des raisons d'appeler cette vérité “philosophique” ? Ainsi, se pose la question suivante : que peut-on faire exactement du point de vue proprement philosophique, c'est-à-dire d'un point de vue qui ne peut pas être simplement historique, avec les productions philosophiques du passé ?
La rencontre avec la philosophie c'est d'abord la rencontre avec les doctrines et avec leur histoire. Il ne faut pas, pour autant, rester à l'état de la philosophie telle qu'elle est actuellement. Il y a l'idée que la philosophie n'est pas une science historique. Or, pour moi, penser l'écriture de l'histoire c'est la même chose que penser l'écriture de la philosophie. Ainsi, l'histoire de la philosophie serait en fait l'histoire de l'écriture de la philosophie. On revient à une simple histoire des pensées penseront certains. Peut-être... Seulement, comme c'est le cas avec l'histoire-récit, il ne faut pas confondre l'histoire des pensées pour “grand public” et l'histoire des pensées pour les universitaires. Cette dernière entre tout à fait dans les préoccupations de Jacques BOUVERESSE. Remettre un philosophe dans son contexte c'est faire de l'histoire de la philosophie. Or, ce qui m'intéresse avec la philosophie c'est de prendre Platon à l'égal de Kant, c'est-à-dire de nier la distance chronologique et géographique. Je veux prendre les idées de chacun pour les confronter et les faire débattre. Le risque est de tomber dans l'anachronisme. En parlant de Kant, aborder Socrate n'est pas anachronique. Or, parler de Kant en lui prêtant les pulsions d'un Eichman n'est pas acceptable (voir Le songe d'Eichman deOnfray).