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Cet exposé n'a pas reçu une excellente note. Il est parfois mal construit ou s'écarte du sujet. Il faudrait nécessairement lui apporter des modifications, peut-être même le réécrire entièrement, mais là n'est pas ma volonté, faute de temps. Si le plan n'est pas adapté, les sujets abordés dans les sous-parties sont à peu près valable concernant le fond, c'est-à-dire les faits et même les débats historiographiques. 

 

INTRODUCTION

 

La notion de « Barbares », ces Autres auxquels Rome fut confrontée, questionne les historiens. Quelles relations les Romains entretenaient-ils avec les nouveaux venus ? Quelle place leur ont-ils accordée ? Avant de répondre un constat tiré de l'Histoire de la Rome antique de Jerphagnon – décédé dans la force de l'âge vendredi dernier à 90 ans seulement, – donc qui fait le constat suivant sur le IIIe siècle : « Quarante neuf ans, vingt-trois Augustes ou Césars, soit une moyenne d'une tête couronnée chaque deux ans. » (p.427) Et d'ajouter : « À n'en pas douter, la pourpre, en ce IIIe siècle, est devenue une profession à haut risque. » (p.427). L'armée est obligé de s'adapter à un type de guerre proche de la « guérilla ». L'empereur, présent davantage sur le front, se doit d'être un bon meneur d'hommes et une personnalité charismatique pour ne pas voire son autorité contesté. Au début du IIIe siècle, les Goths apparaissent au Nord du Danube inférieure, à l'est des Carpates, dans la province de Dacie. Cette province est protégée par un limesà la fois de type fluvial, avec le Danube, et de type montagneux, avec la chaîne des Carpates. Nous reviendrons sur ces provinces danubiennes par la suite. Les Barbares, de l'autre côté de la frontière vont peu à peu se militariser, s'organiser même en confédération en développant des structures quelque peu identiques à celle de la Gaule, c'est-à-dire des routes, des forts, rendant possible des incursions profondes en territoire romain. La complexification des régimes barbares, à la fin du IIe siècle et au début du IIIe, serait du à la fois à l'influence culturelle de Rome et à la fois à la menace permanente des raids punitifs de l'armée romaine. Seulement, tout comme les Barbares, l'Empire romain est en pleine évolution avec une impression de « crise » sénatoriale – en fait un trompe l'œil – et un regain de pouvoir de l'armée. En effet, depuis l'Édit de Caracalla en 212, la citoyenneté est conférée à tout homme libre né au sein de l'Empire. Les empereurs seront bientôt des Thrace, des Daces, des Illyriens et bientôt des Espagnols. La « crise » politique et militaire paraît évidente, du moins pour nos esprits emplies d'idées reçues. Toutefois, peut-on vraiment parler de « crise » au IIIe siècle ? L'armée, trop peu nombreuse, ne peut s'adapter à la situation nouvelle, et se complaît à proclamer de charismatiques Augustes au funeste destin. Cela, incontestablement, contribue à affaiblir l'unité de l'Empire. Dans un soucis de clarté, je limiterais la « crise » gothique à une période comprise entre 238 et 275, tout en pouvant déborder un tantinet si l'occasion s'en présentait. Pour débuter notre réflexion sur les Goths et Rome au IIIe siècle, nous allons aborder leur rencontre. Ensuite, nous irons voyager dans le temps, nous transportant au VIe siècle avec un auteur d'origine barbare, Jordanès. Enfin, nous tenterons d'esquisser les conséquences des invasions gothiques pour l'Empire romain. Ces trois axes de réflexions, nécessairement synthétiques, me permettent de poser la question suivante : comment les Goths, au contact de Rome, ont-ils pu développer une culture « romanisée » tout en se créant une « identité » qui leur est propre ? Pour répondre, je me suis appuyé sur des historiens tels que Carrié, Derousselle, ou encre Kulikowski, Christol et Petit.

 

I. LA RENCONTRE ENTRE LES GOTHS ET LES ROMAINS

 

Marc-Aurèle projetait la création de deux nouvelles provinces au-delà du Danube. Septime Sévère ne s'y aventura pas, préférant, certainement par prudence, renforcer le Norique et la Rhétie. En 235, Maximin le Thrace devient Auguste, mais il meurt rapidement, en 238. Cette date est à retenir car elle marque un tournant en ce début de IIIe siècle. Pour nous, il s'agit de la première fois où les Goths sont mentionnés sous cette appellation. En fait, ils ont franchit le Danube et ils ont ravagés la Dacie. Cette date symbolise le passage du principat au dominat, c'est-à-dire à une domination absolue de l'empereur, notamment par le biais de l'armée. Seulement, il y a ce fait que rappel Jean-Michel Carrié : « Les Goths ont pu, en l'espace d'un siècle, se libérer de la domination vandale, opérer leur déplacement entre bas Danube et Don, devenir une puissance militaire, fédérer des tribus d'ethnies diverses sous l'autorité d'une royauté puissante et, pour finir, contrôler la côte occidentale du Pont-Euxin (la mer Noire) sans que Rome, apparemment, s'en soit émue : elle ne semble s'être intéressé à eux qu'une fois qu'ils eurent semé terreur et désolation en Asie Mineure et dans les Balkans. » (p.96). Cela tombe à point nommé, puisque nous commençons notre réflexion à partir de ce moment. Les Goths étaient devenus une puissance importante sans que les Romains ne s'en aperçoive. Comment cela se peut-il ?

 

L'ethnogenèse des Goths

 

Avant de répondre à cette question, revenons sur les Goths et la question de leurs origines. La notion d'ethnogenèse est liée à l'historien Wolfram. Elle désigne l'émergence d'un groupe ethnique barbare et correspond à des « noyaux de tradition ». En fait, des groupes d'aristocrates emportent avec eux leurs traditions qu'ils transmettent à leurs descendants, et ainsi de suite. Ainsi, les groupes barbares sont très hétérogène les uns avec les autres, mais un seul groupe sera très homogène. La théorie de l'ethnogenèse soutient implicitement la thèse d'une migration des Goths depuis la Suède, puis soutient la thèse d'une assimilation avec Rome, créant ainsi cette fameuse « identité » barbare, en l'occurrence gothique. Pour étayer cette hypothèse, les historiens peuvent s'appuyer sur Jordanès notamment. Pourtant, la question des Goths n'a rien d'anodine. Elle permet de montrer qu'un peuple non-romain possède une histoire et une évolution qui lui est propre. Actuellement, deux théories, qui sont assez proches finalement, tendent à montrer que, soitplusieurs peuples se sont unis au contact de Rome afin de former un « groupe ethnique », puis une fédération, donnant naissance aux Goths ; soitc'est un peuple nordique, déjà constitué, qui aurait migré vers le sud, simplement appelés les Goths au moment de leur apparition au sein de l'Empire. Comment trancher ? Finalement, si l'occupation romaine a rendu possible le développement des Goths, comment ne s'est-elle pas aperçu de cela ? En effet, un peuple qui passerait d'une organisation « primitive » à une organisation « évoluée » – pour utiliser un vocabulaire contemporain un peu dépassé, mais ayant pour mérite d'être compris de tous – ne peut pas passer inaperçu. Pour Michel Kazanski, le contact de Rome aurait contribué au renforcement des Goths sur le plan militaire et politique, mais aussi religieux à partir de la fin du IIIe siècle. Il décrit les Goths comme possédant une culture homogène, des souverains guerriers et une économie prospère. Cette culture est celle de Wielbark. Les peuples concernés vivaient des incursions dans l'empire, mais aussi de l'artisanat et du commerce. En 290, les Goths se divisent en deux groupes : d'un côté une partie dominée par les « nobles », appelés Wisigoths, et de l'autre côté, un autre groupe est lui dirigé par la puissante famille royale des Aumales et seront appelés Ostrogoths. En 2005, Walter Pohl explique que les Goths, s'ils sont un pur produit de l'occupation romaine en Dacie et en Mésie, réagissant positivement à la romanisation, ils ont toutefois développés une « identité » qui leur est propre.

 

Comment les Romains percevaient les Goths : l'interpretatioromana.

 

La représentation classique que les Romains ont des Barbares ce sont les Gaulois. Lors de la guerre des Gaules, les rivalités entre les tribus, l'absence d'un commandement fort, la précarité des alliances, aura longtemps raison des Gaulois. Or, concernant les Goths, il n'en est rien puisqu'il possède un roi assez puissant pour mener une guerre et ne pas se désagréger en cas de défaite. De plus, les Goths, grâce notamment à leur flotte sur mer et à leur cavalerie sur terre, sont capables d'assiéger une cité, de bloquer un port, de se battre en bataille rangée et de mener les raids les plus destructeurs. Les Romains ne connaissent pas les Barbares et ils continuent à penser qu'un peuple frontalier du IIIe siècle est identique à celui qu'il était au Ier siècle, par exemple. Les Grecs utilisaient les termes ethnoset ethnepour désigner une réalité des Barbares plus complexe chez les Romains. Ils utilisaient le terme de genspour la famille élargie. C'est la base. Ensuite, vous avez la natio, communauté de gentes, c'est-à-dire de familles élargies. La terme de genspeut-être traduit par « groupe » en français, mais là aussi il y a des débats, dans lesquelles il est inutile d'entrer ici. Finalement, il va nous apparaître rapidement que « barbares » est un terme générique englobant des réalités fort diverses, reposant sur des idéaux types forgés à partir des habitudes alimentaires, de l'armement, de la technique, des mœurs sexuelles et du rôle des femmes et des hommes dans la société, de la religion ou encore de la langue. Comme nous le faisons encore aujourd'hui, les Romains et les Grecs mettaient les barbares dans des boîtes, des cases, avec des idées reçues et des a priori souvent négatifs. La romanisation permet l'évolution des relations commerciales avec les Romains. Les pillages des Goths amènent souvent des actions punitives de la part de l'armée. Face à cela, les Goths sont contraint de s'unir pour résister. Comme dit le dicton populaire : l'union fait la force. Les Goths s'organisent, finissent par se fédérer et se militariser. Face à un Empire fort comme il l'était au IIe siècle, il apparaît qu'ils n'auraient pas eu le loisir de se développer ainsi. À présent, revenons un instant sur les provinces danubiennes de Mésie et de Dacie.

 

Les provinces danubiennes : la Mésie et la Dacie.

 

Les camps romains sur le Danube sont nombreux. Au IIIe siècle, les corps expéditionnaires forment l'essentiel des armées du Danube. Normalement constitués de troupes d'élites, ces corps se multiplient, davantage composés de provinciaux et de ruraux. La qualité des troupes diminue d'autant. Gallien (260-268) tentera de réformer, avec succès, l'armée en interdisant aux sénateurs le commandement militaire et, aussi, en créant des détachements plus mobiles et plus efficaces. De plus, comme c'est le cas à Oescus, les Romains disposent d'une flotte fluviale chargée de la protection des convois de marchandise et de la surveillance du Danube. Paul Petit souligne d'ailleurs l'importance stratégique de la Dacie et de la Mésie sur le plan militaire. En Dacie, ce sont les mines qui compose l'essentiel des rendements économiques de la province. Cette province sera cédée aux Goths par Aurélien en 271. Quant à la Mésie, elle possède des camps romains, tels que Durostorum, Troesmis et Oescus. Ces villes ont rang de colonies et cette province compte sur le commerce vers la Mer noire pour vivre. Ainsi, une route allait vers Troesmis et Noviodunum, une autre partait d'Odessos jusqu'à Tomi en passant par Dionysiopolis et une dernière route, également au départ d'Odessos, allait jusqu'au bord du Danube en passant par Abrittus et Tropaeum Trajani. La faible urbanisation de ces provinces leurs permettra de ne pas vivre la ruine des élites urbaines, très touchées par la crise monétaire, mais plutôt verra se développer l'installation de colons ou de fermiers barbares, certes au statut précaire, mais ce sont des hommes libres, dont beaucoup obtiendront la citoyenneté romaine. À présent, nous allons en venir à parler d'un texte de Jordanès qui nous parle des évènements de 250-251 notamment.


 

II. LE RÉCIT DE JORDANÈS : CONFLITS ENTRE LES GOTHS ET LES ROMAINS.

 

Le texte de Jordanès est tiré de son Historia Gothica Histoire des Goths en Française -, écrit vers 550. C'est un texte appartenant à la littérature historique. L'auteur n'est pas un contemporain des faits. Jordanès appartient à une famille dont les origines seraient gothiques, en tout cas « barbare ». Lui-même est chrétien et a été, avant cela, secrétaire d'un roi barbare, Gunthigis. Il a une sympathie pour l'Empire romain et le Christianisme. En effet, il a vécut et écrit au moment du règne de Justinien (527-565), celui qui va reconquérir une partie de l'Italie et de l'Afrique, chassant les Ostrogoths et les Vandales. Kulikowski pense que le texte n'est qu'une compilation de la monumentale histoire disparue de Cassiodore. Zosime, un autre historien, ne se cache pas d'avoir copié Cassiodore. Dans l'extrait proposé ici, Jordanès commence à la mort du roi Goth Ostrogotha auquel succède Cniva (ou Kniva). Après avoir ravagé la Mésie, ce roi est repoussé par le duc Galle puis il se retire dans la région de l'Hémus devant l'arrivée de l'empereur Dèce. Cniva attaque l'empereur par surprise à Beroea, ce qui contraint celui-ci à fuir. Après avoir rejoint les troupes du duc Galle il se prépare à la bataille au moment où Cniva et le duc Priscus s'installe à Philippopolis. Dèce est tué lors de cette bataille. Galle et Volusien prennent le pouvoir au moment où la peste s'abat sur l'Empire. Il meurt au bout de deux ans de règne, laissant la place à Gallien.

 

Les combats entre 238 et 275

 

Depuis le début du règne de Maximin le Thrace en 235, les pressions des Barbares aux frontières sont nombreuses. En 238, les Goths franchissent le Danube. Cette incursion va marquer les esprits. Gordien III, par la suite, meurt au combat contre les Perses, puis survient Philippe l'Arabe, préfet du prétoire, qui est tué par Dèce, proclamé empereur en 249 par l'armée du Danube. Jordanès, ligne 18-19, explique que, « quant à Cniva, […] il prit comme allié le duc Priscus ». Ce Priscus se proclama empereur en 249 à Philippopolis et le restera jusqu'en 252. Christol explique qu'en 251, Galle achète la paix aux Goths, ce que confirme Jordanès en écrivant que « ces princes [Galle et Volusien] avaient à peine reçu le pouvoir qu'ils conclurent un traité avec la nation [natio] des Goths ». Dès lors apparaissent les partisans de la lutte anti-barbares et les partisans du paiement de tributs et usage de la diplomatie. C'est en 251 qu'est tué l'empereur Dèce à la bataille d'Abrittus, une ville de Mésie (l.25). La mort de Dèce marque les esprits, comme le disent Aurelius Victor, Léon VI et même Lactance, parlant d'un homme de traditions et d'ordre. Les années suivantes, les Goths sont alliés au royaume du Bosphore. Le gouverneur de Mésie supérieur et de Pannonie, Émilien, bat une armée gothique en août 253, mais il est tué par ses troupes dès le mois d'octobre devant l'arrivée de Valérien, venu venger Galle, un des successeurs de Dèce cité par Jordanès. D'ailleurs, Jordanès fait un tri dans les multiples successeurs de Dèce en ne mentionnant que les trois plus importants à ses yeux, Galle, Volusien et Gallien. Les Goths continuent leurs incursions dans l'Empire. En 255 et 256, les Goths mènent une campagne en Asie Mineure, à laquelle s'associe des Chrétiens, si l'on en croit le récit de Grégoire le Thaumaturge, un contemporain des faits. En 260, sous Gallien, les Goths subissent des défaites, puis sous Claude II (268-270), surnommé d'ailleurs le Gothique. Ensuite, Aurélien tentera de restaurer l'unité de l'Empire. Les Romains finissent par évacuer la Rhétie et la Dacie. Aurélien cède cette dernière province aux Goths en 271. Pourtant, entre 271 et 275, les Goths subissent une série de défaites, mais ils s'allient à d'autres peuples et sont en contacts avec les Perses et les Thraces, peut-être même avec le royaume de Palmyre. Milan finit par remplacer Rome comme capitale et la stratégie de l'armée se transforme en stratégie défensive.

 

Une lecture chrétienne des faits.

 

Au-delà des faits que je viens de décrire, il s'agit de comprendre la représentation des faits de Jordanès. Il donne des indices pour une lecture chrétienne de ce qui a eut lieu en 251. Tout d'abord, pourquoi insiste t-il autant sur la peste ? Pourquoi mentionne t-il un « autel de Dèce » en parlant du lieu de sa mort ? Concernant la peste, il parle de « fléau » (l.33). Quant à Dèce, il mentionne qu'il aurait « sacrifié aux idoles » avant la bataille d'Abrittus (l.28). Au sujet de la peste, Jordanès semble la confondre avec celle qui s'est abattue sur l'Empire d'Orient en 541, sous le règne de Justinien, et qui ravagea l'Égypte, avant de toucher la Gaule puis l'Italie. Ainsi, l'émotion qu'il a put ressentir à ce moment là est perceptible dans le ton qu'il utilise. Il se reconnaît dans cette peste vécue par Galle et Volusien. Il évoque deux noms : celui de Denys (l.32) et celui de l'évêque Cyprien (l.33). La peste de 251 touche l'Afrique du Nord lorsque saint Cyprien (ca.200-258) est évêque de Carthage. Il sera martyre de la persécution de Valérien. Dèce était hostile aux Chrétiens et ils seront obligés de célébrer le culte impérial. Pour Cyprien l'Empire est un obstacle à la venue de la fin des temps, comme les Chrétiens, pour Dèce, sont un obstacle à la paix des dieux, nécessaire pour assurer l'unité de l'Empire. La vision de Cyprien devient très pessimiste à partir de 252. Il attends même l'Antéchrist car il craint, en fait, un effondrement de l'unité impériale. Zosime confirme cela en parlant de menace sérieuses en Orient. Finalement, l'idée circule comme quoi Rome n'est plus capable de maintenir son « imperium », sa domination, sur le monde connu. L'impact psychologique des invasions barbares est réel. Eutrope, dans son abrégé, mentionnent les ravagent des Goths en Grèce, dans le Pont, en Macédoine et en Asie. Dèce était un empereur craint des Chrétiens. Lactance le surnomme « l'exécrable animal » ou encore « l'oppresseur de l'Église ».

 

L'opposition entre les Chrétiens et les Païens

 

Les Chrétiens sont minoritaires, mais comme le montre Jordanès, Dèce « sacrifiait aux idoles » (l.28). Comme je viens de le montrer, il a persécuté les Chrétiens. Les moments de répits qu'ils aient eut sont sous Sévère Alexandre entre 222 et 235 et sous Gallien, entre 259 et 268. Wolfgang Wischemeyer pose le problème de la manifestation du christianisme à la fin du IIe siècle et au début du IVe. Ce n'est pas une religion homogène, structurée comme elle le sera déjà au Ve siècle et au début du Moyen-Âge. Il existe des divergences théologiques. Il est intéressant de constater que les notions d'hérésie et de schisme apparaissent à cette époque troublée. L'illusion du christianisme semble être son apparente unité dans une société divisée. Une communauté type de Chrétiens était composée d'une église, du mobilier et du personnel, ainsi que d'un entrepôt et d'une bibliothèque. Les Chrétiens vivaient principalement du commerce. C'est un fait qui permet de comprendre la capacité, par les caravanes de commerçants, à diffuser le christianisme dans l'Empire. Être chrétien, c'est un mode de vie, une philosophie. La mort devient le symbole de la paix intérieure. Les martyrs sont porteurs de cette idée de paix. Pour Cyprien, le caractère public du christianisme va de paire avec son autorité et sa crédibilité. Lui-même Cyprien, se préoccupe de la vie publique de sa ville de Carthage. Païens et paganisme sont des dérivés populaires, parfois rencontrés sous les vocables « idolâtres » - comme c'est le cas pour notre texte – ou de « barbares ». Dans la conscience chrétienne, il y a deux visions des Païens. La première est pessimiste, affirmant que le salut des Païens est en péril. Ceux-ci sont ignorants et idolâtres. Les Païens, dis Luc, sont « assis dans les ténèbres à l'ombre de la mort ». La seconde montre le Païen comme une créature unique de Dieu, corrompue par le péché origine qui a laissé à l'âme un besoin de salut. Le païen est naturellement chrétien. Finalement, le paganisme c'est ce qu'il ne faut pas être, c'est un miroir en négatif dirait Wischemeyer. Le paganisme repose sur le culte des ancêtre, le culte fondateur, comme c'est le cas chez les Romains, mais aussi chez les Francs et chez les Goths. C'est une religion locale, attachée à un territoire et à une mythologie.


 

III.LES CONSÉQUENCES POUR L'EMPIRE ROMAIN DE LA PRESSION DES GOTHS SUR LES RIVES DU DANUBE

 

Les conséquences à court terme sont catastrophiques puisque l'impact psychologique est évident et l'armée est obligée d'évacuer la Rhétie et la Dacie au profit des Alamans et des Goths. La Dacie sera d'ailleurs cédé par Aurélien aux Goths en 271. Cela nous permet d'aborder le débat concernant la défense de l'Empire. Dans ces régions, la romanisation se ressent, c'est une évidence et il y a des preuves archéologiques, mais elle prend des formes diverses et variées. En effet, les Goths forment une confédération de peuples. Cela renforce leur force. En fait, il ressort de tout cela que l'armée n'est plus adaptée et que l'ambition des généraux provoquent des usurpations qui affaiblissent l'unité de l'Empire. Toutefois, sur le long terme, l'Empire affiche une remarquable capacité de résistance. La Bretagne ne sera évacuée qu'en 407, tandis que la Belgique ne tombera définitivement aux mains des Francs qu'au milieu du Ve siècle. La région du Danube sera la proie des Goths pendant des années encore, mais si ils parviendront jusque dans Constantinople à la fin du IVe siècle, ils en seront chassés par la population. Donc, finalement, si l'Empire présente, à la fin du IIIe siècle, une défense fébrile de ses frontières et une certaine instabilité, cela ne présage pas de sa chute. L'unité de l'Empire est resté intacte durant toutes ses années d'instabilité, malgré des usurpations en série, dont même certains historiens ont du mal à démêler tous les tenants et aboutissements. Sur le moyen terme, en revanche, les conséquences de la « crise » du IIIe siècle feront rapidement naître l'idée que l'imperium de l'Empire doit être partagé entre deux Augustes afin d'être plus facile à gérer. Bien sûr, tout cela sans rompre officiellement la précieuse unité. La construction de la ville de Constantinople au début du IVe siècle, scellera, d'une certaine manière, l'avenir de l'Empire en préfigurant quelques années avant, la division de l'empire en 395, que nous savons définitive alors que ce n'était pas le cas des contemporains.

Une autre conséquence, touchant cette fois les Barbares, concerne leur assimilation. En effet, la romanisation, tout en créant un rapprochement entre des cultures différentes, va aussi permettre la christianisation des peuples barbares. Les Goths deviennent Chrétiens dès la fin du IIIe siècle. Ils seront arien. Cela constituera un point important de leur « identité ». Ils se démarquent de l'Empire par leur religion, tout étant intégrer à celui-ci par un statut de « fédérer ». Finalement, vu sur le long terme, la « crise » du IIIe siècle est une victoire d'une branche du Christianisme, l'arianisme. En 324, Constantin le Grand, considéré comme le modèle de l'empereur chrétien, devient le maître de tout l'Empire. L'unité est retrouvée, ainsi que la paix et l'harmonie. Toutefois, la victoire des Goths à Andrinople le 9 août 378, qui se soldera par le massacre de l'armée romaine et surtout la mort de l'empereur Valens, semble définitivement sceller la main mise des barbares sur l'Empire romain. Les autorités ne pourront plus gouverner sans tenir compte des Barbares. Ainsi, à la fin du IVe siècle et au Ve siècle, la politique des empereurs est de diviser les groupes Barbares entre eux ou les placer aux frontières afin qu'ils assurent la défense de l'Empire.

L'arrivée des Goths est plus problématique pour l'Église, car s'ils se convertissent rapidement, dès la fin du IIIe siècle, c'est pour adopter l'arianisme, c'est-à-dire une hérésie. Les Chrétiens vont trouver une porte de sortie par la reconnaissance officielle, sous Constantin le Grand, du dogme « orthodoxe ». Le IVe siècle sera celui des conciles, avec Nicée notamment, contre l'arianisme par exemple. Pourtant, le paganisme reste très présent dans les zones rurales. L'édit interdisant le culte des anciens dieux et exigeant la destruction des temples sous Théodose le Grand, suscitera des révoltes dans certaines régions de la Gaule, jusqu'au VIe siècle si l'on en croit certains passage du livre de Grégoire de Tours. Ramsay MacMullen, explique que le culte des « idoles » perdurera jusqu'au VIe siècle, voire encore plus tardivement jusqu'au VIIIe.

Finalement, comme le faitJean-Michel Carrié, il convient de relativiser l'impact de la « crise » financière, ou plutôt monétaire, ainsi que l'impact des épidémies de peste. Van Ossel préfère voire dans les fameux trésors monétaires du IIIe siècle, la conséquence des dévaluations en série avant la création d'une nouvelle monnaie, l'aurelianus, par l'empereur Aurélien, comme son l'indique. L'épidémie de peste de 250 est également a relativiser concernant son ampleur, malgré une réalité dans les régions danubiennes. Cela sous-entend d'ailleurs que les Goths ont été certainement autant touchés que les Romains. Concluons en disant que tout cela mis bout à bout permet de dresser un constat plus positif de la fameuse « crise » du IIIe siècle et de l'impact des invasions gothiques, qui, malgré leur violence à certains moment, n'ont pas entraîner la chute de l'Empire sur le long terme. L'exemple de la Tétrarchie, qui dura environ une trentaine d'années, est l'illustration des capacités d'adaptations des empereurs romain. Il faut donc relativiser la « crise » politique, même s'il est indéniable que le IIIe siècle fut un tournant puisque les Barbares prennent un ascendant dans l'administration impériale et dans l'armée. C'est le moment ou le système du principat devient celui du dominat.

 

CONCLUSION

 

Pour conclure, rappelons simplement, que l'apparition des Goths dans les régions du Danube n'est pas le fruit du hasard, mais le fait d'une conjoncture favorable. L'affaiblissement intérieur de l'Empire, la difficulté pour un seul empereur de gérer des pressions extérieures sur plusieurs fronts, permet les invasions gothiques. Les Romains n'ont pas perçu l'état de développement des Goths avant les premiers combats. Peu à peu, avec Gallien, puis avec Aurélien, l'Empire est réorganisé ainsi que l'armée. Si les usurpations continuent encore jusqu'à la création de la Tétrarchie. Celle-ci ne met toutefois par fin aux séditions puisque Constantin, avant d'être Auguste en Orient, était un usurpateur. Ce que l'on verra naître, c'est la puissance des généraux qui, au Ve siècle, ne prendront même plus la peine de se proclamer empereur, mais ils proclameront des empereurs fantoches, d'extraction sénatoriale la plupart du temps. Ainsi, au IVe siècle nous avons Arbogast et Eugène en Occident, puis Ricimaire au Ve pour les plus connus.

 

Simon Levacher,

Licence 2, 2010-2011

Université du Havre

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