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1 septembre 2012 6 01 /09 /septembre /2012 17:39

L’histoire ne va pas de soi. Penser une période historique, qu’est-ce que cela signifie ? Lorsqu’un historien intervient à la radio pour parler d’un événement, pour donner son avis sur l’actualité, que fait-il ? Fait-il acte de mémoire, de simple analyste ou fait-il œuvre d’historien ?

 

1. Comprendre

Depuis le début de ce blog, je cherche à m’interroger sur la pratique de l’histoire, sur sa pensée, sur la manière de la faire. Mes débuts dans la recherche, même si ma méthode est imparfaite, me permettent de percevoir la discipline à un niveau supérieur, celui de l’enquêteur. Dès lors, comparer l’historien à un juge d’instruction peut faire sourire, mais l’image reste parlante au grand public. Il faut du temps et de l’organisation. Certes ! Il faut surtout comprendre sa période. Avant de faire de l’histoire, il faut comprendre pourquoi on en fait. Il faut comprendre à quoi ça sert de poser telle ou telle question, d’analyser tel ou tel concept. Pour ma part, ce sont les « rapports de domination » sous la Restauration qui m’ont intéressé pour mon mémoire de recherche. Le XIXe siècle, avec Marx notamment, insiste sur la dichotomie, bourgeois et prolétaires, dominants et dominés. Les rapports entre les deux ont toujours été tendus. Dans l’imaginaire du grand public, il existait une frontière imperméable entre les deux « classes sociales ».

Est-ce que les choses sont si caricaturales ? Si je pose la question, c’est que la réponse risque fort d’être « non ». Il faut comprendre que ce sujet me permet de revenir sur des questions générales : la domination politique (hiérarchie politique, les fonctionnaires, les électeurs, la démonstration et la représentation du pouvoir, fêtes publiques, etc.), la domination économique (la hiérarchie économique, les moyens à leur disposition, les négociants, les ouvriers, les artisans, etc.) et la domination sociale (les élites politiques et économiques, leurs relations, les indigents, les conflits sociaux, les politiques sociales). Finalement, l’apprenti historien que je suis se pose des questions : comment se met en place la domination ? Quels sont les rapports entretenu entre les dominants et les dominés ? L’ascension sociale est-elle possible ? Quel est le degré de contrôle de l’État ? Comment les dominants se détachent-ils socialement des dominés ? Je passe de nombreuses questions et interrogations, mais c’est pour donner une idée.

 

2. Faire

Il faut ensuite faire de l’histoire. Comment ? Avec une méthode sérieuse, apprise à l’université. Faire de l’histoire ne s’invente pas. L’apprentissage est nécessaire. Un bachelier qui sort du lycée ne sait pas faire de l’histoire. Certes, il a fait de l’histoire, dans le sens où il a eu des cours d’histoire, qu’il a fait des dissertations, etc. Seulement, il a fait tout cela à partir de connaissances préétablies. Parfois, le lycéen fera des commentaires de textes, mais sur des textes de dix à vingt lignes. Les explications de textes à la fac n’ont rien à voir. C’est quatre fois plus. Or, faire de la recherche en histoire c’est gérer plusieurs milliers de photos, c’est organiser son travail en fonction d’un plan qui peut changer, c’est accepter de travailler sans savoir ce que l’on va trouver. Au tout début on part s’en avoir de problématique définie, en n’émettant quelques hypothèses, mais sans plus. Certes, j’avais un thème, qui lui-même a évoluer puisque je m’étais porté sur les « rapports de pouvoir » avant d’élargir aux « rapports de domination ». L’objectif est de boucler le mémoire en deux ans, soi presque en deux fois moins de temps qu’une thèse. Il ne faut donc pas avoir un sujet trop difficile, impossible à faire, mais il ne faut pas non plus avoir un sujet circonscrit, qui ne présente aucune ouverture.

En effet, faire de la recherche historique, c’est aussi accepter de tâtonner, d’ouvrir des dossiers parfois déjà aborder, mais un mémoire est censé apporter des choses nouvelles. Dès lors, tous les aspects d’un sujet ne pourront pas être forcément abordés. Il faut toujours jongler avec cela, c’est-à-dire laisser volontairement de côté un aspect pour en approfondir d’autres. Il faut motiver ses choix aussi. Tout cela rentre dans la complexité de la recherche, même si, souvent, les gens extérieurs n’ont pas conscience des difficultés. Ses difficultés ne sont pas descriptibles, elles se vivent au quotidien, car le chercheur a très peu de temps pour lui. Il lui faut travailler le soir, parfois jusqu’à trois heures du matin. L’étudiant en master de recherche doit accepter de sacrifier ses vacances pour s’enfermer aux archives. Il faut aimer ça. Faire de l’histoire c’est donc à la fois la méthode, le choix du sujet et son évolution, et la recherche en archives proprement dites.

 

3. Penser

Je voudrais revenir sur la question de départ : penser une période de l’histoire, qu’est-ce que cela signifie ? Cela englobe les deux points que je viens d’aborder : comprendre et faire. D’une part, il faut comprendre ce que l’on cherche à savoir sur la période en question (émettre des hypothèses) et il faut circonscrire son sujet (international, national, local). D’autre part, il faut faire sa recherche historique en fonction de méthodes universitaires, en fonction de la bibliographie connue sur le sujet et en fonction des documents qui se trouvent en archives. Enfin, il faut accepter d’y consacrer le plus de temps possible.

Penser une période historique c’est la comprendre en faisant de l’historien, en entrant au cœur des événements. Les documents permettent de faire connaissance avec des personnages connus et inconnus. Bref, c’est accéder à une part de l’histoire plus méconnu du grand public que même les livres de vulgarisation ne transmettent pas. La lecture des thèses permet de comprendre un peu mieux les mécanismes de la recherche, de la construction de la discipline. Juger le travail d’un historien présuppose de connaître le mécanisme de la construction de la connaissance historique. Défendre une thèse sans nuancer le moins du monde, avancer des éléments qui s’avèrent invérifiable ou extravagants, tout le monde peut le faire. En revanche, être capable de critiquer ses sources, de faire la part des choses lorsqu’un contemporain de la période témoigne, cela c’est déjà faire œuvre d’historien, du moins de quelqu’un qui se soucie de différencié le personnel de l’impersonnel. Un fait transparaît dans un témoignage, mais le témoin est rarement neutre.

 

Pour conclure, il convient de marteler ici que comprendre le passé, c’est aussi traiter des documents. On ne fait d’histoire sans documents où on ne fait pas d’histoire uniquement avec des témoignages. Beaucoup de choses peuvent servir au chercheur, peuvent servir de pièces à conviction pour le juge d’instruction. Enquêter, c’est rassembler, c’est aussi parfois donner son avis et interpréter les pièces qui ont été misent au dossier afin de leur donner un sens, qui ne doit être ni à charge, ni à décharge, mais le plus neutre possible.

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15 juillet 2012 7 15 /07 /juillet /2012 00:42

 


 
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18 juin 2012 1 18 /06 /juin /2012 16:55

Premier sujet de philosophie du baccalauréat littéraire 2012. Le texte qui suit n'est pas un corrigé, car il n'y a pas de réelle problématique, ni même de plan. Il s'agit des premières idées, certes ordonnées, que le sujet m'a inspiré. De fait, la réflexion s'arrête un peu brutalement, mais, par la suite, il s'agirait de réordonner ces éléments au brouillon pour constituer un plan et faire une dissertation qui ait du contenu. Pour ma part, j'ai passé le bac littéraire en 2009. Concernant la philo, j'ai eu 15 sur 20. Mais, cela fait longtemps que je n'ai pas fait de dissertation de philosophie. De fait, il n'y aura pas beaucoup de références, par peur de faire des erreurs dans l'utilisation des auteurs.

 

Les deux mots importants du sujet sont « gagne » et « travaillant ». Il faut aussi faire attention au « que » et au sujet « on ».

 

Il ne faut pas penser tout de suite que le travail est nécessairement salarié. « Tout travail mérite salaire », dit-on souvent. Bien sûr, on garde ce qui nous viens à l'esprit en l'inscrivant au brouillon.

 

L'objectif est de reformuler la question : on gagne quoi en travaillant ? C'est qui « on » ? Ici, il s'agit d'un pronom impersonnel et donc, il est possible de le remplacer par « monsieur ou madame tout le monde ». Que gagne « monsieur ou madame tout le monde » en travaillant ?

 

Maintenant, revenons au « quoi ». Qu'est-ce qu'il cache ? De l'argent ? Du plaisir ? De la souffrance ? Cela amène l'idée que nous ne gagnons pas forcément des choses positives en travaillant, puisqu'il y a aussi du négatif.

 

La notion de « gagne » se doit d'être nuancée. En effet, si on travaille pour gagner quelque chose, cela sous-tend qu'il est possible de perdre !

 

Ce sujet fera curieusement échos, aux lycéens qui s'intéressent à la politique, au « travaillez plus pour gagner plus » de Nicolas Sarkozy. Ici, « gagner » renvoie à de l'argent.

 

Or, un que gagne un esclave en travaillant ? Pas grand chose... Peut-on, aussi, gagner sans travailler ? Ici, les « actionnaires », ceux qui joue avec l'argent, peuvent être évoqués.

 

Et puis, que gagne t-on en travaillant lorsque l'on est bénévole ? Un certain prestige social ? La défense d'une cause....

 

Le travail scolaire, fort spécifique, si les lycéens ont du culot, ils peuvent l'évoquer et dire que le travail scolaire permet de décrocher le baccalauréat. Plancher sur sa dissertation de philosophie nécessite d'avoir travaillé avant (ce qui remonte à loin me concernant pour la philosophie). On travail pour gagner, pour obtenir le baccalauréat et donc le droit d'aller dans l'enseignement supérieur, ou dans d'autres écoles et filières.

 

De fait, au fur et à mesure de la pensée, la notion de « travail » prend plusieurs connotations, c'est-à-dire plusieurs degré. Le travail n'est pas le même et n'a pas le même sens pour tout le monde.

 

Dès lors, tout le monde n'attend pas la même chose en travaillant. Certains vont travailler pour le plaisir. À partir de là, peut-on dire qu'il s'agit d'un travail ? Pour moi, c'est évident, parce que, que l'on aime ou non son travail, il implique de l'énergie, de l'engagement, etc.

 

Le travail s'avère souvent payant et donc, généralement, on gagne plus en travaillant que si l'on ne travail pas.

 

Toutefois, si les gens travaillent plus pour gagner plus d'argent, ils perdent de leur temps pour être avec leur famille, pour les loisirs, etc.

 

En travaillant plus, on ne gagne donc pas forcément plus puisqu'il s'agit de peser le pour et le contre. Si je travail plus, oui je gagne plus d'argent, mais, d'un autre côté, si je travail plus pour gagner plus d'argent, je perd de mon temps de loisir et pour être avec ma famille.

 

Néanmoins, pour nuancer, les bénévoles peuvent travailler beaucoup et, de manière fort paradoxale, ce ne sont pas forcément eux qui gagnent quelque chose, mais ce sont des gens pour qui ils travaillent, pour qui ils s'investissent, ou bien c'est l'association pour laquelle ils sont bénévoles. Pourtant, le bénévole gagne à s'investir puisqu'il le fait pour une cause à laquelle il croit.

 

Dès lors, apparaît l'idée que nous ne travaillons pas nécessairement pour gagner quelque chose de matériel, mais aussi pour une cause, dont la finalité peut-être, certes, matérielle, mais dont l'origine est idéologique (le plus souvent). Pour défendre quelque chose auquel on croit, nous sommes prêt à le faire en travaillant.

 

L'idée apparaît, peu à peu, que le travail ne semble pas désintéressé. Il y a, d'une manière ou d'une autre, un intérêt à travailler puisque, soit nous gagnons quelque chose pour nous, soit nous gagnons quelque chose au profit d'autres personnes, parfois les deux.

 

Un salarié, en travaillant, le fait pour toucher son salaire à la fin du mois, mais, en même temps, il exécute des tâches pour le compte d'une entreprise ou d'une municipalité, etc.

 

Ici, pour mettre une référence (en philosophie, je n'aimais pas les références, préférant penser par moi-même), il est possible d'avancer Marx qui parle du travail productif et qui nous parle des ouvriers. Il parle de rapports de production en désignant par là, le fait que les hommes produisent ce qui leur est nécessaire pour vivre.

 

On peut prendre, pour illustrer, à l'extrême, ce point, l'image de l'esclave (qui appartient à un maître) qui fait tout pour son maître, qui ne sait rien faire. Si l'esclave arrête de travailler, le maître ne peut plus vivre. Il ne sait rien faire, donc il dépend du travail de son esclave, qui ne gagne rien à travailler pour un maître qui le réduit en esclavage. Le problème est que le système esclavagiste veut que l'esclave soit la propriété d'un maître. Donc, qu'il travail pour celui qui ne travail pas.

 

À l'inverse, certaines formes d'organisations du travail, comme les coopératives, permettent aux travailleurs de travailler les uns pour les autres. Chaque travailleur dépend du travail des autres. Ce que quelqu'un gagne (par exemple, la vente d'une récolte), tous bénéficieront d'une partie, ou de l'intégralité de la vente (c'est-à-dire redistribué équitablement, ou avec une part plus élévé pour le producteur, entre les membres de la coopérativ e). Ceux qui produisent plus permettent à ceux qui produisent moins de vivrent tout de même.

 

Ici, on gagne à travailler pour les autres, car le bon fonctionnement de la coopérative dépend du travail fourni. Si on travail moins, on risque d'avoir moins de moyens l'année suivante, etc. Une coopérative c'est la mise en commun des moyens de production. De cette mise en commun dépendra les récoltes à venir.

 

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14 juin 2012 4 14 /06 /juin /2012 12:41

Qu’est-ce que sont les Lumières ? Tous ceux qui ont fait un peu de philo au Lycée, connaissent, où ont entendu parler du fameux texte de KANT. Les Lumières, dans l’analyse la plus large du mouvement de pensée, va créer les conditions nécessaires à l’émergence des courants politiques du XIXe siècle. Tzvetan TODOROV, dans L’Esprit des Lumières (2007), reprend un travail de recherche effectué pour une exposition virtuelle de la BNF (voir ici : http://expositions.bnf.fr/lumieres/index.htm) Cette pensée repose sur plusieurs points importants, qui sont encore des éléments très contemporain, même si nous assistons, comme le dit fort justement Pierre Rosanvallon (en parlant de l’égalité), à un « grand retournement ». La Révolution française a tout fait pour libérer la société de l’autorité religieuse, en soumettant les officiants de l’Église catholique à un sévère régime de restriction de la pratique du culte. Ajoutons que, assez paradoxalement d’ailleurs, si le XVIIIe (mais les XIXe et XXe ne sont pas beaucoup mieux) fut misogyne, il prône l’éducation et laissent aux femmes de la bourgeoisie le soin de s’occuper de ses enfants. C’est évidemment l’idéal de ROUSSEAU.

En philosophie, le XVIIIe siècle repose sur deux principales notions, pour simplifier à l’extrême : la raison et l’expérience. Prenons l’exemple de BERKELEY (1685-1753), qui n’est pas à proprement parler un philosophe des Lumières. Il a élaboré la théorie dite de l’immatérialisme. Ce que nous connaissons, dit-il, nous nous le représentons sous la forme d’idées. Par exemple, une table (une chose faite de matière) existe simplement parce que nous savons (par la raison), qu’une table correspond à telle idée. La table n’existe pas pour un martien qui verrait cet objet de l’extérieur car il n’a pas « l’idée » de ce qu’est une table. Pour BERKELEY, les choses existent parce qu’elles sont incarnées par un esprit supérieur qui peut-être Dieu. Un corps n’existe que parce qu’il est perçu comme tel. Une table existe comme table parce qu’elle est perçue par nous comme étant une table. En fait, adapter à l’éducation, on a une conception très aristocratique : être quelqu’un c’est être tel qu’on nous perçoit. En fait, un bourgeois est bourgeois parce qu’il est perçu comme tel par la société. Ce n’est pas idiot du tout comme vision des choses. Percevoir des odeurs n’est possible que si l’on possède ce sens. En revanche, étant anosmique (je ne sens pas les odeurs), il est possible de percevoir l’effet d’une odeur, non par l’expérience de l’odeur, mais par la seule raison (je sais que tel  ou tel chose ça sent pas bon). Il ouvre le chemin vers l’idéalisme, notamment celui des philosophes Allemands. La table n’existe pas indépendamment de la façon dont nous allons la penser.

Cette pensée philosophique de l’abstraction va se compléter par une vision des choses fondée sur l’expérience, notamment sur l’expérience scientifique. C’est l’essor, entre autre de l’astronomie et de la physique, avec NEWTON (1642-1727) et sa pomme qui lui tombe sur la tête. Il faut imaginer ce qu’a été sa découverte simplement avec un fruit qui tombe d’un arbre. C’est quelqu’un qui se pose des tas de questions. Reprenons du début. NEWTON cherche à comprendre par quelle force la Lune est « attachée » à la Terre. Lorsque la pomme tombe (il y avait des vergers dans la ferme familiale) il se dit que c’est la même force qui maintien la Lune dans l’orbite de la Terre. On parle de loi de la gravitation que l’on explique par la force du même nom. En fait, on parle de l’attraction d’un corps sur un autre corps. C’est une banalité au XXIe siècle (quoi que…).    

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30 mai 2012 3 30 /05 /mai /2012 12:10

 

L'auteur et sa démarche

 

Michel Foucault, né en 1926 à Poitiers dans une famille bourgeoise (son père était chirurgien), est mort du sida en 1984 à Paris. Normalien, agrégé de philosophie, Foucault est nommé professeur à l'université de Clermont-Ferrand en 1960. En 1970, il est élu professeur au Collège de France. Il enseigne jusqu'à sa mort. Il a exercé une grande influence sur son temps. Jules Vuillemin explique que « dés la thèse qui le rendit, d'emblée, célèbre,L'Histoire de la Folie aux XVIIe et XVIIIe siècles (1961), à travers l'établissement des critères qui servaient à décider du « renfermement », ce ne sont pas à proprement parler les abus que Michel Foucault dénonce : l'amalgame des motifs, la police des superstitions, des mœurs, et même du chômage. C'est d'abord et essentiellement le discours »1

Foucault, par sa manière de travailler est un précurseur d'une histoire des idées, d'une histoire culturelle dont Roger Chartier, et dans une moindre mesure Pierre Rosanvallon, actuellement professeurs au Collège de France, sont des héritiers. Cette démarche est celle de s'intéresser aux archives plus qu'aux textes, mais avec pour ambition de faire de la socio-histoire, c'est-à-dire de partir d'un concept, d'une idée et d'en faire une sorte d'historique, mêlant philosophie et sociologie. Vuillemin ajoute : « C'est en 1973 seulement que Moi, Pierre Rivière, ayant égorgé ma mère, ma sœur et mon frère. Un cas de parricide au XIXe siècle,puis, en 1975, Surveiller et punir, Naissance de la prison, avaient explicitement posé la question du partage entre droit et crime partout présente dans l'œuvre de Foucault. L'analyse le fit voir, les détours qui conduisent au discours justificateur de l'ordre sont aussi éloignés du schéma marxiste expliquant par la lutte des classes la genèse de la violence légale que les détours qui conduisaient au discours justificateur de la raison l'étaient du schéma freudien. »

 

 

Le contexte

 

Un Groupe d'information sur les prisons (GIP) est créé en décembre 1970. Michel Foucault (1926-1984) milite en faveur d'une enquête indépendante sur la situation des prisonniers en France. En juin 1971, le GIP rend public sa première étude, Enquête dans 20 prisons. La même année le cours de Foucault au Collège de France est consacré aux « Théories et institutions pénales ». Une révolte des prisonniers de la centrale Ney de Toul éclate le 5 décembre 1971. Les raisons de cette mutinerie ce sont les mauvais traitements, psychologiques et physiques, que subissent les prisonniers. Michel Foucault va participer à la collecte des témoignages des mutins et va jouer le rôle du relais d'information. En décembre 1972, le GIP laisse sa place au Comité d'action des prisonniers (CAP). Foucault s'investit dans la mise en place du quotidien Libération. En 1973, il consacre son cours au Collège de France à « La Société punitive » et commence les études préparatoires de Surveiller et punir. « Dans [son cours au Collège de France] « La société punitive », Foucault met justement en place les grandes articulations de ce qui deviendra Surveiller et punir. (…) Il pose deux problèmes : comment l'enfermement, de peine marginale qu'il était à l'âge classique, a-t-il pu devenir la forme générale de la pénalité ? Comment la prison, ayant dès sa naissance fait l'objet de critiques fondamentales, a-t-elle pu s'implanter aussi profondément et rapidement ? Pour Foucault, le problème se situe au niveau des rapports entre le pouvoir politique et les corps qu'il faut dresser. »2Il va donner une série de conférences à Montréal en 1974 grâce auxquelles il ajuste le texte final de son livre. Surveiller et punir paraît chez Gallimard en 1975.

 

 

Le contenu

 

L'idée de surveillance, puis celle de punition, apparaissent tour à tour dans le plan de Surveiller et punir choisi par Michel Foucault. L'État ayant le monopole de la violence il se doit de montrer sa puissance par les punitions qu'il inflige. Sous l'Ancien Régime, le corps revêt une grande importance. Damien est supplicié de la manière la plus barbare parce qu'il a porté atteinte au corps physique, mais surtout moral du roi. La première partie du livre, « Supplice », comprends 78 pages. Il met en place, introduit en quelque sorte sur l'idée de la « souffrance du corps ». Pour Gros, « Le corps supplicié et souffrant manifestait la vérité du crime commis et la supériorité atroce de la force du roi qui s'était trouvé blessé par l'infraction. Cette cérémonie punitive mettait en scène pour Foucault la vengeance symbolique et physique du Prince blessé contre le criminel infâme ». Seulement, cette « sombre fête punitive » est en train de s'éteindre à la fin du XVIIIe siècle. Sous l'impulsion de Beccaria, les supplices disparaissent.

La peine de mort est acceptée, mais il s'agit de rendre la mort plus douce. Foucault aborde ce point aux pages 123 à 159 dans la partie « Punition » (72 pages). Pour Frédéric Gros, « la technique punitive laisse comprendre comme jouant au niveau des représentations : elle est une technique des représentations visant à décourager, par un spectacle édifiant et mesurée des peines, des velléités criminelles. En ceci elle s'oppose aux anciennes cérémonies du supplice. Dans le supplice, on trouvait la même idée de publicité de la peine : spectacle public de la souffrance. »3

Il se pose ensuite la question de la « discipline ». Celle-ci est abordée dans la troisième partie de l'ouvrage. Avec ses 108 pages, c'est la plus conséquente de Surveiller et puniret c'est la mieux construite en terme de planification. La discipline fait appelle au respect de la norme, de la règle. Une Commission disciplinaire dans une Université ne fait rien de plus que de sanctionner le nom respect des règles. Il en a va de même ici. La partie la plus conséquente après celle sur la « Discipline » concerne celle sur la « Prison » qui totalise 93 pages. Gilles Deleuze dans son Foucault (1984), explique « qu'une des idées essentielles de Surveiller et punir est que les sociétés moderne peuvent se définir comme des sociétés « disciplinaires » ; mais la discipline ne peut pas s'identifier avec une institution ni avec un appareil, précisément parce qu'elle est un type de pouvoir, une technologie, qui traverse toutes sortes d'appareils et d'institutions pour les relier, les prolonger, les faire converger, les faire s'exercer sur un nouveau mode »4.

Foucault s'interroge sur les rapports du citoyen à cette société « disciplinaire ». Désormais, il ne convient plus de se venger du criminel, ni même de l'humilier pour ce qu'il a fait, mais il convient de lui faire comprendre qu'il ne respecte par les règles de la société et la discipline est là pour éviter les déviances et pour corriger ses défiances. Jean-François Bert, dans son Introduction à Michel Foucault(2011), explique que « si le citoyen est censé avoir accepté une fois pour toutes les lois de la société, y compris celle-là même qui risque de le punir, le criminel ne peut plus apparaître que comme un individu juridiquement paradoxal qui, en rompant le pacte initial, incarne ''l'ennemi de la société toute entière...'' »5. Comme je viens de le montrer, le fait de surveiller implique donc nécessairement de corriger les déviances aux règles, à la norme sociale. Pour ce faire ajoute Jean-François Bert, « les nombreux dispositifs disciplinaires ont besoin pour fonctionner d'un savoir particulier sur les comportements, une « orthopédie sociale », dira Foucault, qui mobilise à la fois la connaissance du parcours singulier de chaque individu et la connaissance comparative des comportements des différents individus au sein d'une population donnée ».

Foucault nous explique que « La discipline procède d'abord à la répartition des individus dans l'espace. Pour cela, elle met en œuvre plusieurs techniques »6. Ces techniques sont au nombre de quatre : la clôture7, le quadrillage8, les emplacements fonctionnels9, et enfin les rangs10. Foucault conclut en disant que Les disciplines en organisant les « cellules », les « places » et les « rangs » fabriquent des espaces complexes : à la fois architecturaux, fonctionnels et hiérarchiques. Ce sont des espaces qui assurent la fixation et permettent la circulation ; ils découpent des segments individuels et établissent des liaisons opératoires ; ils marquent des places et indiquent des valeurs; ils garantissent l'obéissance des individus, mais aussi une meilleure économie du temps et des gestes. »11Une bonne manière de discipliner l'individu, c'est le panoptique.

Le panoptisme est longuement décrit par Foucault – 39 pages – au sujet duquel il écrit : « Le Panopticon de Bentham est la figure architecturale de cette composition. On en connaît le principe : à la périphérie un bâtiment en anneau; au centre, une tour; celle -ci est percée de larges fenêtres qui ouvrent sur la face intérieure de l'anneau ; le bâtiment périphérique est divisé en cellules, dont chacune traverse toute l'épaisseur du bâtiment ; elles ont deux fenêtres, l'une vers l'intérieur, correspondant aux fenêtres de la tour; l'autre, donnant sur l'extérieur, permet à la lumière de traverser la cellule de part en part. Il suffit alors de placer un surveillant dans la tour centrale, et dans chaque cellule d'enfermer un fou, un malade, un condamné, un ouvrier ou un écolier. Par l'effet du contre-jour, on peut saisir de la tour, se découpant exactement sur la lumière, les petites silhouettes captives dans les cellules de la périphérie. Autant de cages, autant de petits théâtres, où chaque acteur est seul, parfaitement individualisé et constamment visible. Le dispositif panoptique aménage des unités spatiales qui permettent de voir sans arrêt et de reconnaître aussitôt »12.

Au XVIIIe siècle, Jérémy Bentham (1748-1832) met donc en place l'idée du panoptique, inspiré du mythe de la caverne de Platon. Il se demande comment s'organise la surveillance des prisons. Par exemple, dans le cul de basse-fosse, les prisonniers sont entassés les uns sur les autres. Bentham s'oppose à cette pratique car pour lui la prison doit priver les coupables de liberté et non les humilier par toute sorte de déviances ou de privations matérielles. La lumière du jour permet de voir le prisonnier par son ombre. Le soldat est sur le toit. L'individu se sent surveillé en permanence et cela suffit. Le but est de discipliner les individus afin qu'ils anticipent la sanction et donc qu'ils se contrôlent.

Abordons à présent la partie intitulée « Prison », à laquelle Foucault accorde tout de même 93 pages. Pour lui, « la prison sera l'instrument privilégié du redressement, de la « réhabilitation ». Foucault isole trois principes à la base de cette stratégie : le panoptisme, surveillance constante et généralisée ; la discipline, utilisation optimale des forces disponibles ; la normalisation, uniformisation des fonctions individuelles. » Pour Pierre Lascoumes, « l'attention centrale portée à la prison dans Surveiller et punir s'explique bien sûr par le fait qu'elle incarne la généralisation d'un nouveau mode de pénalité, mais peut-être surtout par le fait qu'elle ne fait « que reproduire, qui à les accentuer un peu, tous les mécanismes qu'on trouve dans le corps social » (p.235). La prison est ainsi la métaphore, ou mieux l'épure d'un ensemble d'organisations modernes à partir desquelles la société bourgeoise est en train de s'institutionnaliser. (…) La prison a (…) un double fondement : juridico-économique dans sa finalité, technico-disciplinaire dans ses structures »13.

 

______ Notes ______

 

1 Hommage à Michel Foucault sur le site du Collège de France [consulté le 16 février 2012].

2Foucault, Résumé des cours (1970-1982), Conférences, essais et leçons du Collège de France, Paris, Julliard, 1989.

3Gros, Michel Foucault, PUF, 1996, p.64

4Foucualt, p.33

5Introduction à Michel Faucault, p.59

6Surveiller et punir, p.166

7Surveiller et punir, p.166-167

8Surveiller et punir, p.167-171

9Surveiller et punir, p.168-171

10Surveiller et punir, p.171-172

11Surveiller et punir, p.173

12Surveiller et punir, p.233

13Cicchini et Porret (dir.), Les sphères du pénal avec Foucault, éditions des Antipodes, 2007, p.23.

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11 février 2012 6 11 /02 /février /2012 19:56

index.jpegLa fraude est intellectuellement malhonnête. Des cas de plagiats ont été détectés à l'Université du Havre au printemps 2010. Nous avions eut le droit à une leçon de morale de notre professeure d'histoire médiévale, Mme Sansy. La lecture d'un essai de Marie-Estelle Pech, L'école de la triche, dans lequel elle revient sur la diffusion d'un exercice de mathématique du baccalauréat en juin 2011, me permet de relancer un « vieux » débat.

 

En effet, quel intérêt y-a t-il a tricher ? À l'Université du Havre, celle-ci est très répandue, notamment en licence 1. Les étudiants, lors des contrôles en amphis, s'arrange pour se mettre à côté – et cela même avec un siège d'écart entre eux – afin de se passer les brouillons. Les précautions, comme avoir un brouillon de couleur différente, ne change pas grand chose. La témérité de nos chers collègues de première année est sans-limite. Pour ma part, je n'ai triché qu'une fois en classe de seconde et je n'en suis pas forcément fier, d'autant que cela ne m'a pas apporté grand chose au final.

 

Les professeurs, à l'Université, prennent des mesures contre la triche, mais c'est très difficile à détecter. Pourtant, la majorité des « conseil de discipline » sont réunis pour cause de plagiat et triche lors des examens. Le copiage et le copier-coller sont les principales formes de fraude. Souvent, les professeurs n'ont pas le temps de vérifier les textes d'un exposé ou d'un dossier avec un logiciel contre le plagiat, et la fraude passe inaperçue. Dès lors, la suspicion est de mise. Beaucoup d'étudiant, dont moi-même et un camarade de licence 2, avons été soupçonnés de n'avoir pas écrit nous-même nos exposés. Bien sûr, c'est une allégation sans fondement, car la pratique de l'écriture, additionné d'un fort amour-propre, nous exclus d'emblée de cette odieuse pratique.

 

La recherche est pour moi un plaisir. L'écriture en est un autre. Fabriquer un texte doit être personnel et le style également. Pour ma part, ma façon d'écrire ne peut être dissociable de ma personnalité, de ma manière de penser. Cela donne à nos travaux universitaires une certaine authenticité, indispensable pour prétendre s'affirmer en tant que chercheur reconnu par ses collègues pour ses mérites et non sa réussite scolaire en elle-même. Avoir un diplôme n'est pas une preuve de notre intégrité morale et de notre honnêteté intellectuelle. Cette expression peut paraître quelque peu pompeuse, mais elle est nécessaire pour comprendre la fameuse « Crise des Consciences » dont le constat à motivé la création de ce blog.

 

Marie-Estelle Pech est journaliste au Figaro, journal à l'opposé de mes idées, mais elle a le mérite de dresser un portrait simple et réaliste de ce qu'est la situation de l'éducation actuellement. La course au diplôme enlève, de facto, aux élèves le plaisir d'apprendre pour apprendre, c'est-à-dire pour se cultiver. Dès lors, dans les mentalités, jusqu'à l'université, l'idée dominante est celle d'apprendre pour réussir son examen afin d'être le plus qualifié. Cela entraîne une course à l'opportunisme et à l'individualisme que je méprise profondément.

 

Personnellement, j'ai toujours défendu mon projet scolaire quoi qu'il arrive et j'ai toujours voulu mériter mon passage dans les classes supérieurs. Certes, j'ai été soutenu par des professeurs, mais parce que j'ai su leur montrer ma capacité à faire des efforts et à me remettre en cause. C'est crucial ! Et je ne suis pas vieux pour affirmer cela. J'ai tout juste 22 ans. Faire des efforts est humain. Se remettre en cause aussi. Les deux choses ne sont pas insurmontable. La réussite scolaire étant plus importante que la formation intellectuelle dans l'esprit des gens, il devient bien difficile de contredire les individus remettant en cause la valeur des diplômes. Ces diplôme étant obtenu par la triche – que certains considère massive – il est évident que les élèves ayant travaillé pour l'obtenir sont dévalués.

 

Pour moi, cette dévaluation des diplômes est un mirage, car proportionnellement, les très bons élèves ne sont pas plus nombreux qu'avant. De plus, beaucoup de pontes de l'université l'affirment : les thésards sont souvent plus rigoureux et érudits que leurs aînés. Bref, la formation est meilleure et la prise en compte par certains étudiants des règles est une réalité. Les conséquences de ces améliorations méthodologiques donnent des recherches de très bonne qualité. Il convient aussi de souligner que la massification a forcément une incidence sur la proportion des fraudes. Celle-ci ne sont pas plus nombreuses, mais plus « massive » car les élèves sont plus nombreux. Dès lors, les fraudes se « voient » davantage.

 

Il est vrai cependant que le « copiage sur le voisin » est facile, surtout lorsque celui-ci est complice. Se donner des réponses discrètement n'est pas bien compliqué. Toutefois, pour ma part, si la triche pourrait être une pratique assez courante, elle ne me viendrait à l'esprit en aucune manière. Réussir un examen sans avoir la fierté d'y être pour quelque chose m'insupporte. D'ailleurs, l'impunité des fraudeurs est souvent décourageante pour les étudiants honnêtes. Marie-Estelle Pech, page 111, pose la question suivante en titre de chapitre : « Pourquoi triche t-on ? » Vaste questionnement, en effet. Pour les tricheurs, c'est facile, ça permet de faire peu d'efforts et le risque d'être pris est minime. Peut-être... Pourtant, le risque pour un étudiant n'est pas négligeable : il peut encourir jusqu'à deux ans d'interdiction de passer un diplôme universitaire en France.

 

La question de l'injustice des notes est aussi un fait non négligeable que j'ai personnellement éprouvé à l'université. Une professeure d'histoire moderne a noté de manière totalement injuste des exposés oraux. En effet, certains d'entre-nous, dont je faisais parti, ont travaillé plusieurs heures (j'en ai compté une trentaine) sur un des tout premiers exposé oral de notre cursus. D'autres, sans doute plus malin diront les intéressés, ont cherché dans les livres un plan et des connaissances, ne prenant pas la peine de construire leur propre raisonnement. Le fait qu'ils ajoutent une présentation power point, leur a donné un avantage aux yeux de la professeure. Cette injustice aurait pu m'inciter à en faire de même. S'il suffit de reprendre des plans dans des bouquins et des articles, mettant en plus quelques connaissances innattendues, pour avoir la moyenne, pourquoi se priver ?

 

Je me pose encore la question : pourquoi ne suis-je pas tombé dans la facilité de ce type d'attitude ? Je n'ai pas la réponse. Je pense, par amour-propre surtout. Aujourd'hui, à l'Université du Havre, certains étudiants en troisième année – ils me pardonneront de les accuser – ont réussit sans grand mérite. Je suis un étudiant moyen et j'ai donc des notes ressemblantes à ceux qui ne font pas grand chose. J'en conçois une certaine honte car j'estime avoir obtenu mes résultats en travaillant beaucoup, en comparaison avec mes difficultés scolaires du Collège et du Lycée. C'est injuste quelque part ! Les autres élèves de ma promotion ont de bien meilleurs résultats que les miens. J'ai environ 11,5 de moyenne et je n'arrive pas à travailler plus que ce que je fais. C'est déjà un exploit par rapport à mon passé scolaire. Ainsi, cela peut provoquer un sérieux sentiment d'injustice de la part d'étudiant comme moi. De plus, j'ai souvent eut l'impression d'être déprécié par mon entourage qui m'affirme que l'université est « facile ».

 

Le niveau universitaire n'est pas plus faible qu'avant, du moins pas encore, mais l'état d'esprit de certain est lamentable. Dès lors, et je suis rarement moralisateur, mais la crise des consciences de ces dernières années est une réalité face à laquelle il conviendra de réagir. L'absence de culture parmi la classe politique au sommet de l'état ne présage rien de bon et les nouvelles réformes des programmes non plus. Les élèves se doivent d'enregistrer le plus de connaissances possibles. Cela n'est pas à la portée de tous, car comme moi, beaucoup ont des difficultés pour apprendre par coeur. Le par coeur ne permet pas l'exercice de l'esprit critique, nécessaire à chaque situation pour se forger une opinion sur l'actualité. Savoir que la bataille de Marignan à eut lieu en 1515 ne permet pas de comprendre ses enjeux, ni même ses répercussions. Bref, c'est un savoir encyclopédique sans intérêt pour une formation universitaire nécessitant de réfléchir et de comprendre, d'organiser ses connaissances pour répondre à une problématique.

 

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14 octobre 2011 5 14 /10 /octobre /2011 20:54

Les enfants doivent acquérir des connaissances et développer leur esprit critique. Pour ce faire, entre l'enseignant et l'apprenant doit être passé un pacte implicite (ou explicite) de non-agression. Une sorte de « paix sociale ». L'élève doit avoir des limites, mais aussi le droit à la parole.

 

Dans l'école, la « concurrence » est un mot très important. En effet, faire mieux que l'autre, que les autres, est devenu la règle, voire même la ligne politique générale.

 

Chacun fait un peu ce qu'il veut, pourvu qu'il soit le meilleur. Le résultat de cela c'est le développement d'une forme d'autoritarisme, avec une accentuation du stress et des désillusions des élèves.

 

Les professeurs laissent tomber – ou font grève – taxé ensuite de fainéantise et de vénalité par les parents, la plupart appartenant à la classe moyenne supérieur (fonction publique, artisans, commerçants, médecins...)

 

Les élèves doivent « savoir » et non pas « comprendre » les connaissances qui leurs sont demandés d'apprendre. Par exemple, pourquoi 1789 est une date importante ?

 

Pour le professeur, la plupart du temps, et de manière totalement inconsciente, il ne va pas même se demander si l'élève a compris pourquoi 1789 est une date importante.

 

En effet, peu importe, tant que l'élève sait que c'est une date importante. Du coup, on limite les élèves à des « aptitudes » : soit capable de...et je....

 

A : Si vous retenez bien que 1789 est une date importante qui marque le début de la Révolution française, vous aurez une bonne note.

B : Mais, pourquoi c'est important de savoir ça ?

A : Sais-le et tu comprendra plus tard.

 

Ce genre de réplique entre un professeur (A) et un élève (B) n'est plus possible. J'ai vécu cela au collège ou des professeurs d'histoire refusait d'approfondir sur certain point car c'est trop compliqué pour nous ou parce que ce n'est pas au programme.

 

En effet, la plupart du temps, les professeurs ne prennent pas le temps d'expliquer aux élèves le pourquoi du comment parce qu'il y a un socle de leçons à assurer, un programme à finir en fait.

 

À ce socle, s'ajoute des options obligatoires (une deuxième langue au collège, par exemple) et pour les meilleurs éléments, des options facultatives (tel que le latin en cinquième ou en seconde).

 

De plus, du fait de l'accentuation des inégalités scolaire, du retard scolaire d'un nombre croissant d'enfant, la question de l'autorité des professeurs dans les classes est un sujet politique sensible, notamment en France, avec une majorité qui a fait de se thème une fixation.

 

Finalement, construire la démocratie est une chose, la faire vivre en est une autre.

 

 

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17 septembre 2011 6 17 /09 /septembre /2011 18:13

lucien-jerphagnon-jankelevitch-labsolu-entrev-L-_Q1wXs-212x.jpgLucien Jerphagnon, philosophe français, disciple de Jankélévitch et professeur de Onfray, est un de mes auteurs favoris. Son Histoire de la Rome antique m'a permis de comprendre davantage cette civilisation qui m'était alors inconnue. Son vieux style, fluide et agréable, son humour, rendait la lecture de ses livres attrayante. Il a écrit sur l'idéologie impériale, sur la sagesse romaine, dans Au bonheur des sages. Ami de Paul Veyne, son approche du monde antique, mélangeant philosophie, histoire et littérature, est d'une érudition simple et profonde.

 

 Image : Lucien Jerphagnon (source : Le blog de l'histoire)

 

Un jeune étudiant rendant hommage à un vieux professeur peut prêter à sourire. Pourtant, les sages ont longtemps eut un aura plus important que la jeunesse. Lucien Jerphagnon n'était peut être pas un sage, mais la relégation d'une oeuvre aux oubliettes sous prétexte de son ancienneté, n'est pas recevable. L'érudition de ses anciens qui quittent ce monde en ces temps de crise, sont autant de perte irremplaçable pour la littérature, la culture du pays de Voltaire et Rousseau.

 

Il est heureux que ce professeur de Nancy ait encore droit de citer dans une bibliographie d'histoire ancienne concernant sa biographie sur Julien l'Apostat. Né en 1921, il est mort hier, vendredi 16 septembre 2011 à l'âge de 90 ans. Son dernier – des entretiens – s'intitule De l'amour, de la mort, de Dieu et autres bagatelles. Il prenait la vie avec une certaine décontraction apparente, un certain humour, une certaine philosophie, sans jamais laissé de côté la pédagogie et l'érudition.

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10 juin 2011 5 10 /06 /juin /2011 23:58

En France, c'est le terme d'histoire contemporaine qui a pris le dessus, c'est-à-dire une histoire qui englobe à la fois l'historien et ceux à qui elle s'adresse. Gérard Noiriel s'est intéressé à cette notion d'histoire contemporaine sur laquelle il a écrit un manuel fort intéressant. La perception de l'histoire contemporaine va certainement évoluer. D'ailleurs, il y a plusieurs échelles de perception.

  • L'histoire contemporaine, pour tout le monde, commence en 1789 avec le début de la Révolution française. Peu après, l'année 1792 est celle de la proclamation de la République, mais c'est aussi l'année du déclenchement de la guerre en Europe. Cette guerre va conduire la France au rang de grande puissance continentale avec l'empire de Napoléon avant de faire retomber le pays au rang de puissance moyenne avec le congrès de Vienne en 1815. Ensuite, la Révolution industrielle va bouleverser les mentalités, permettant la naissance de la sociologie. L'impérialisme colonial français favorise le capitalisme libéral et son antithèse, le matérialisme économique.

  • L'ambition globalisante n'est toutefois pas totalement obsolète et nous pouvons, en nous appuyant sur un découpage en tranche de 80 années ou, au moins, en fonction de l'espérance de vie à chaque époque, partir de notre temps et, à l'échelle d'un siècle, deux peut-être, c'est-à-dire l'histoire contemporaine dans son acception universitaire, étudier les évolutions génération par génération, faire du Thibaudet en quelque sorte.

  • Aujourd'hui, le champ d'étude des historiens du temps présent remonte aux années 1930 ou, si l'on veux être plus précis, nous pouvons prendre la crise de 1929 comme point de départ. En fait, cela permet de rester dans la perspective d'une histoire contemporaine en mouvement, évoluant au fur et à mesure du temps. En effet, l'histoire contemporaine telle qu'elle est définie aujourd'hui apparaît comme un temps figé entre les années 1780 et nos jours.

 

Le risque majeur de cette histoire du temps présent reste la subjectivité et la partialité. Le « temps présent » est souvent réduit à une démarche journalistique ou sociologique. Pour beaucoup d'historiens, comme pour mon professeur d'histoire contemporaine, Christian Chevandier, les travaux sociologiques sont des témoignages, des documents, mais aucune des études de recherche digne de considération. Or, la sociologie est presque une discipline incontournable en histoire contemporaine et en histoire du temps présent. Sans elle, les historiens contemporains, dont la plupart font de la sociologie sans l'appeller ainsi, n'auraient pas grand chose à se mettre sous la dent. L'avantage de cette histoire sociologique – ou socio-histoire – est d'être flexible, d'une part, en ne s'attachant pas à un événement marquant et, d'autre part, en ne sclérosant pas la pensée d'analyse de l'historien du temps présent.


Il est intéressant d'avoir cette double approche et de prendre en compte plusieurs « échelles » d'analyse. Par exemple, en 1789, l'histoire contemporaine avec une définition élargie de deux siècles, tombe en 1589, c'est-à-dire avec l'assassinat d'Henri III. L'histoire du temps présent, si l'on considère une espérance de vie de quarante à soixante ans, nous pouvons reculer de 1729 à 1749. Lorsque l'on regarde les évènements marquant pour les contemporains, il y a la mort de Louis XIV en 1715 dont ceux qui ont connus le roi sont fort peu nombreux en 1789. Cela revient, pour nous, à parler des contemporains de la Grande Guerre (1914-1915) ou de ceux de la Seconde Guerre Mondiale pour 2011. Ils sont peu nombreux. Il ne faut pas oublier les représentations des contemporains lorsque l'on cherche à saisir la réalité d'une époque.

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10 juin 2011 5 10 /06 /juin /2011 23:52

Depuis les années 60, l'histoire économique et l'histoire des mentalités sont dominantes. Dans les trente dernières années, des courants novateurs ont pointés le bout de leur nez. Je commencerais par trois temps important.

  • Dans un premier temps, l'histoire italienne n'est pas opposée aux Annales et elle s'intéresse à l'histoire des marchés, des groupes sociaux ou encore à l'histoire de la culture populaire. Ainsi, la micro-histoire va être davantage portée vers le récit de vie, la biographie, vers l'originalité et la richesse des parcours individuels. Les micro-historiens vont réduire leur objet d'étude. Toutefois, la micro-histoire arrive véritable en France à partir des années 1980 même si c'est un courant encore minoritaire n'ayant d'ailleurs pas vocation à devenir majoritaire. Peu à peu, le récit revient à la mode, mais il se complexifie, notamment dans son écriture. Il est moins linéaire, laissant toutefois de côté les grands ensembles, les structures et les superstructures, leur préférant l'action humaine.

  • Dans un second temps, la socio-histoire s'impose avec Gérard Noiriel. Ce courant est basé sur l'interdisciplinarité avec l'idée qu'il faut se méfier du théorique. Il y a un élément important, c'est le passé dans le présent. C'est plus une méthode qu'une théorie, c'est une démarche en fait. Pour les tenants de cette histoire il faut déconstruire les concepts de l'histoire des années soixante afin de retrouver les individus à l'intérieur des structures. Ainsi, il faut présenter des groupements et non des entités collectives.

  • Dans un troisième temps, réunissant les deux premiers, disons que les problémes posés tournent autours des liens entre les individus, autours des relations de pouvoir, etc. En effet, le pouvoir c'est le ciment des rapports sociaux. Il faut problématiser le discours des dirigeants politiques et, quelque part, l'idée de hiérarchie sociale semble importante dans les travaux de ces chercheurs. Faire appel à la sociologie, à l'anthropologie, voir même à l'ethnologie, permet de mettre en place une histoire pluridisciplinaire à laquelle je crois beaucoup. À l'université, il ne faudrait pas étudier uniquement une discipline mais avoir une approche globalisante.

 

Toutefois, la micro-histoire et la socio-histoire ne sont pas fondées directement sur l'individu. Elles insèrent plutôt des personnes dans un réseau de relations qui, tout à la fois, aide et contraigne ces mêmes personnes. Il est donc intéressant de noter que cette histoire sociale nouvelle est davantage axée sur les expériences individuelles afin de produire des connaissances neuves et non sur des catégories toute faite permettant, de manière presque systématique, de comprendre les évolutions du monde. Ainsi, la démarche empirique et le recours aux archives sont d'une importance cruciale pour le micro-historien. De fait, ces nouvelles perspectives et démarches vont être intégrées dans l'histoire du temps présent qui est une histoire en mouvement. Elle englobe les personnes vivantes, pouvant témoigner, étant porteur d'une mémoire collective qu'il convient d'étudier. L'idée force est de comprendre le présent par le passé en quelque sorte.

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Présentation

  • : La Crise des Consciences
  • : Ce blog a été créé par un étudiant en histoire et sociologie de l'Université du Havre. Il propose des articles allant du travail universitaire (exposé, compte-rendu...) à l'analyse spontanée de l'actualité... Il est donc à la fois objectif et subjectif, partial et impartial, méritant la plus grande prudence concernant les analyses de l'actualité notamment car elles sont parfois politiquement orientées.
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