Relayons bêtement, stupides moutons, les infâmes propos des réactionnaires économistes les plus lucides... et les moins écoutés ! Les médias se délectent des propos piquant d'un Frédéric Lordon ou bien satanisent les paroles d'un Paul Jorion. Ah, les chiens, comment ces apôtres de l'apocalypse osent-ils faire peur au bas-peuple ? Les preneurs de décisions, qui jouent notre minable avenir sur cette terre, sont des bêtes individus déconnectés d'une odieuse réalité : des millions de gens vivent en dessous du seuil de pauvreté en Europe ! Une petite centaine d'actionnaires sans foi ni loi pillent la planète et les peuples, détenant les richesses, profitant d'une hypothétique « crise » pour s'en mettre plein les poches. Pourtant, ils licencient à tour de bras. Pourtant, nos charmants comiques d'hommes politiques nous assènent sans cesse de belles paroles chlorophormiques. De la rigueur, encore de rigueur ! Eh oui, crise oblige !
Quelques part, asphyxié sous une monumentale masse de conneries congénitales, des gens osent penser le contraire de la « norme ». Scandale ! Comment osent-ils penser de tels insanités terrorisantes ? Ah, la démocratie, vain mot qui aurait fort à gagner si l'on taxait le non-respect des droits de l'Homme comme on fait payer aux pauvres les erreurs et les stupides jeux d'argents des riches. Comment osent-ils se proclamer alter-mondialistes ou même, infamie suprême, anticapitalistes ? « Curieusement, les enjeux de la mondialisation (déjà réduite aux échanges) et de la « productivité », qui sont évoqués sous l’espèce d’une antinomie (soit l’un, soit l’autre, et plutôt le second que le premier), ne sont jamais montrés dans leur possible rapport de complémentarité, peut-être même de causalité : car après tout, qu’est-ce qui soutient la course folle à la productivité sinon à la fois les formidables pressions de la concurrence « non faussée » (avec des salariés chinois à 100 euros mensuels, on ne peut pas dire que la concurrence n’est pas loyale... On verra ce qu’on verra quand l’Afrique à 15 euros entrera dans le jeu !) et l’injonction au relèvement permanent de la rentabilité financière, expression même de l’empire de la finance actionnariale, soit les piliers de ce qu’on peut nommer mondialisation ? » (Frédéric Lordon, août 2011)
Maintenant les politiciens font du pied à la Chine pour payer la dette des Européens... Celle-ci refusant bien sûr de prendre sur elle un poids financier bien incertain quant à sa solidité. La peur revient... L'Allemagne entraînant la France dans le gouffre, la Chine achetant la Grèce et le Portugal... L'euro qui ne tiendrait pas la fin du mois... Stupide tout cela ? « Oui, sans doute, la Chine finira par se doter d’institutions salariales matures propres à solvabiliser un marché intérieur et, de grande exportatrice, elle deviendra notre grande cliente — mais quand exactement ? Dans dix ans ? Quinze ? Une solution pour tenir jusque-là ? Ou bien le patience-ça-va-bientôt-payer ? Et quid de l’idée que, comme la Chine à 150 euros deviendra à son tour victime des délocalisations au Vietnam à 75, la mondialisation ne connaisse un prévisible rebond en direction du continent africain — encore entièrement à enrôler ! et qui, lui, cassera tous les prix. Encore une dernière tournée de patience pour un petit demi-siècle afin que l’Afrique ait accompli son propre parcours ? » (Frédéric Lordon, août 2011)
Notre chers apocalyptiques décroissants ont trouvés à leurs côtés les fumeux porteurs de la démondialisation. « Les craquements du système et les gifles répétées du réel ont fini par ouvrir des brèches où les arguments trop longtemps interdits ont trouvé à faire résurgence — il est vrai qu’un système dont la défense contraint ses amis à la rhétorique du « globalement positif » est généralement plus près des poubelles de l’histoire que de son apothéose. Légèrement déboussolé, l’économiste Elie Cohen constate que « le discours de la mondialisation heureuse est difficile (sic) à tenir aujourd’hui ». Le mot de « démondialisation », dont il est maintenant convenu d’attribuer la paternité à l’économiste philippin Walden Bello, est devenu assez logiquement le signifiant d’un horizon politique désirable pour toutes les colères sociales que la mondialisation ne cesse de faire naître. Car à la fin des fins, les choses sont plutôt simples : si un accord s’est fait assez aisément pour nommer « mondialisation » la configuration présente du capitalisme, alors il devrait s’en faire un aussi facilement pour entendre dans « démondialisation » l’affirmation d’un projet de rupture avec cet ordre. » (Frédéric Lordon, août 2011)
Et Frédéric Lordon, continue, lancinant à faire heureusement peur au vaste monde qui n'ouvrira certainement les yeux qu'au bord de la mort : « Aussi aimerait-on rappeler que l’« horreur national-protectionniste » fordiste a été une époque, sans doute imparfaite, de plein-emploi, de croissance — il est vrai sans conscience écologique — et de paix entre pays avancés, certes relative seulement, mais tout de même... On ne sache pas davantage que le principe national ait été aboli même dans le monde supposé mondialisé car, informons les libéraux et les alter-mondialistes, il y a encore des nations ! Il y a la Chine, il y a les Etats-Unis, dont curieusement on ne questionne jamais ni le nationalisme ni les affirmations de souveraineté. Ces deux-là riraient beaucoup si on leur demandait de se fondre dans de plus vastes ensembles. Et, chose plus surprenante, ces indécrottables nations ne se font pas nécessairement la guerre, et elles ne nous la font pas non plus !
On ne sache pas enfin que les rapports entre les nations doivent se concevoir sous l’exclusive perspective de la marchandise, et l’on reste un peu sidéré que la Javel libérale ait fini par lessiver les entendements au point de faire oublier qu’entraver un peu la circulation des conteneurs et des capitaux n’interdit nullement de promouvoir la plus grande circulation des œuvres, des étudiants, des artistes, des chercheurs, des touristes, comme si la circulation marchande était devenue la jauge exclusive du degré d’ouverture des nations ! — et seule la mauvaise foi peut prêter à la démondialisation de vouloir liquider les « bonnes » circulations avec les « mauvaises ». » (Frédéric Lordon, août 2011)
Le rassurant Jacques Sapir, dans la foulée, nous lance : « il n’existe aucun moyen juridique pour expulser un pays de la zone euro. » (30.11.11) En plus, il en rajoute, le bougre : « une procédure d’expulsion de l’Union européenne prendrait des années, et pendant ce temps, la Grèce pourrait imprimer autant d’euros qu’elle voudrait… La Grèce pourrait ainsi racheter la totalité de sa dette le temps qu’on l’expulse. » Et de suite s'en prend à la rigoriste politique allemande : « Pour être clair, si les Grecs ne sont pas « blancs-bleus » avec leur tradition d’évasion fiscale (d'ailleurs réalisée par moins de 10% de la population), leur absence de cadastre, les exemptions d’impôts dont bénéficie l’Église orthodoxe, il me semble que l’importance de ces défauts est en fait bien faible quand on la compare aux conséquences de la politique allemande. » Sapir, tentant d'apporter des solutions, continue sur sa lancée : « Puisque l’on ne peut rien faire à la BCE du fait du veto allemand, il faut décentraliser la création monétaire. Autrement dit, il faut réquisitionner les Banques centrales nationales et leur imposer de créer des euros en échange d’une partie des dettes publiques, ce qui se fait par un simple jeu d’écriture. » Sa conclusion ressemble fort à celle de l'arroseur arrosé : « Bien entendu, on nous opposera l’article 123 du traité de Lisbonne. Ce à quoi on peut rétorquer que s’il s’agit de mesures temporaires prises pour pallier une crise à la gravité extrême, les règles de l’Union Européenne sont de notre côté. Ce serait l’équivalent d’un « quantitative easing» à l’européenne, mais réalisé de manière décentralisée, et dont l’effet inflationniste serait très réduit du fait de la situation économique dominante. » Il finit pas « ça » : « Et là, c’est l’Allemagne cette fois qui serait au pied du mur. Soit elle accepte, en criant et en tempêtant, mais elle accepte quand même cette politique, quitte à s’arranger avec sa Constitution. Après tout, on ne paye pas les constitutionnalistes à ne rien faire… Soit, elle décide de quitter la zone euro. Mais là, il lui faudra faire face à cette réalité : l’euro maintenu se dépréciera par rapport au dollar, sans doute jusqu’à 1 euro pour 1,05 dollar. Par contre, le mark reconstitué devrait s’envoler et atteindre les 1,60 dollar, si ce n’est plus… Autrement dit la zone euro « maintenue » aurait dévalué de près de 35% (au minimum) par rapport au mark, et les excédents commerciaux allemands disparaîtraient immédiatement. Chiche ? »
Quand au magazine Marianne il se pose la question de la sortie de la France de la zone euro. « Imaginons que la France souhaite sortir de la Zone Euro et décide d’en sortir unilatéralement. Elle recrée donc des Francs. Pour la simplicité, la France retient la règle suivante : 1 nouveau Franc vaut 1 Euro. Examinons s’il y aura une catastrophe ou si le scénario est maîtrisable ? » (29.11.11) Il analyse d'abord les éventuelles conséquences d'une telle décision :
Monnaie
L’Allemagne est le seul grand pays AAA à pouvoir soutenir la Zone Euro. Le risque d’éclatement de l’Euro est immense puisque l’Allemagne ne peut continuer à soutenir seule les pays en difficultés. D’autre part, la sortie de la France donne des idées à d’autres pays de la Zone Euro, notamment les pays du Sud de l’Europe. Aussi, l’Euro ne s’apprécie pas contre le Franc. Nous examinerons tout de même tous les cas.
Financement de l’Etat
Le Financement de l’Etat français se faisant maintenant à 0.25% auprès de la Banque de France, il n’y a plus de problèmes d’émission de dettes pour le Trésor Français. La règle d’or sur le déficit budgétaire permet aussi de rassurer les citoyens français et les investisseurs étrangers sur la volonté de la France de ne pas s’engager dans un cycle sans fin de « planche à billet ».
Banques
Pendant les vacances bancaires, on teste les banques. A cause notamment de ce changement de Monnaie, des banques sont en faillite virtuelle car elles ont perdu tous leurs fonds propres. L’Etat les nationalise à 0 Euros et les renfloue, prenant le contrôle d’une partie du système bancaire du pays. Comme l’Etat peut se financer à 0.25% auprès de la Banque de France, ceci est très facile. En échange de ce renflouement, l’Etat est riche de la valeur future de ces établissements bancaires repris pour presque rien.
De nombreuses personnes considèrent que la sortie d’un pays de la Zone Euro est impossible car :
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il faudrait négocier la sortie de l’euro avec tous les autres Etats.
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ce serait un désastre pour les banques puis cela entraînerait des restrictions de crédits.
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il y aurait beaucoup d’inflation.
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les monnaies faibles entraîneraient une désagrégation du tissu social.
---> « il faudrait négocier la sortie de l’euro » ? Il est toujours possible de rompre un traité international de manière unilatéral. Pour ne pas se mettre en porte-à-faux vis-à-vis de l’ensemble de la Zone Euro, le gouvernement français peut proposer à d’autres pays de la Zone Euro de sortir de l’Euro avec la France et surtout, expliquer sa sortie par le refus de faire payer aux populations des plans d’austérités budgétaires qui étouffent les plus faibles.
---> « Ce serait un désastre pour certaines banques » ? Le choix de les fermer une semaine permettra à l’Etat de recapitaliser le système bancaire à un niveau normal. Il n’y aura pas de restrictions de crédits. L’Etat devenant propriétaire de certaines banques aura une certaine influence sur le système du crédit.
---> « Il y aurait beaucoup d’inflation ». Il y aura de l’inflation pour des pays comme l’Espagne et l’Italie du fait de la forte dévaluation de leurs monnaies s’ils sortaient de l’euro. Cependant, l’Italie avait vu sa monnaie dévaluée de 30% en 1992 par rapport au Deutsche Mark sans qu’un pic d’inflation important ne se déclenche. Pour la France, cette dévaluation serait certainement très raisonnable comme nous l’avons montré plus haut. L’inflation serait donc elle aussi raisonnable et l’adoption d’une règle d’or sur le budget ancrerait les anticipations d’inflations et de dévaluations sur des niveaux assez faibles.
---> « la désagrégation du tissu social qu’entraînerait des monnaies faibles » ? On est dans le pur fantasme. La Grèce voit son tissu social se désagréger avec les plans d’austérité adoptés, dans le but de tenir sa dette et de rester dans l’Euro. Dans une moindre mesure, il y a aussi une grande souffrance sociale au Portugal, en Irlande, en Espagne et en Italie. La désagrégation du tissu social que l’on voit actuellement vient de la nécessité de plans d’austérité pour rester dans l’euro, pas d’une sortie de l’Euro telle qu’on l’a envisagée.
Nous l’avons montré dans ce document, la France si elle le souhaite pourrait techniquement, assez facilement réussir à revenir au Franc. Est-ce la solution que le pays souhaite prendre, nous ne nous permettons pas de juger de la pertinence politique de cette décision.
Mais il n’y aurait pas de catastrophe et l’Europe pourrait continuer d’exister. L’expérience de l’Euro aurait été un échec mais cela ne condamnerait pas l’Europe. En revanche, si « l’Europe » continuait pouLe Monde Diplomatiquer sauver l’Euro à demander pendant une longue période de temps des plans d’austérité très dures aux populations, le risque de re jet de l’Europe par les citoyens est sans conteste un danger majeur pour sa survie à terme.
Bibliographie :
Le Monde Diplomatique
Marianne 2
Antlantico