La tête du roi Henri IV a fait, il y a peu, la une des journaux. L'année 2010 fut bien sûr l'année Henri IV puisque l'on célébrait le quatre-centième anniversaire de sa mort. C'est, en effet, le 14 mai 1610 qu'il est poignardé par Ravaillac. Celui que l'on surnomma le Ver-Galant était aimé du peuple mais haï par une grande part de la noblesse protestante et catholique qui lui reprochait ses positions religieuses changeantes.
Pourtant, choisi comme successeur par Henri III, Henri de Navarre devra mettre le siège devant Paris, craignant même d'être pris en tenaille entre l'armée de la Ligue et l'armée espagnole. La trahison des Catholiques finira par agacer le bas peuple. De plus, Henri bat les ligeurs à Arques (1589) puis Ivry (1590). Sans aucune déclaration de guerre l'Espagne envoie des troupes en France. Henri IV s'en souviendra et en 1595 prend les devants en déclarant la guerre.
Peu avant, le duc de Mayenne tente de faire élir un nouveau roi mais son plan est déjoué. Gabrielle d'Estrées est alors la maîtresse du roi. Elle n'a pas vingt-ans. Le roi l'aurait bien épousé mais la reine en titre, Marguerite de Valois s'y opposait. En tout cas, Gabrielle pousse Henri a abjuré la foi protestante pour la catholique. C'est ainsi que, solennellement, en la basilique Saint-Denis, le 25 juillet 1593, il abjure une foi pour une autre.
Détail du tableau Gabrielle d'Estrées et sa soeur
(école de Fontainebleau)
Il promet des cadeaux aux villes qui se rallient à “son panache blanc”. Il promet ainsi 25 millions de livres (90 millions d'euros). Pour payer, il augmente la taille et provoque une révolte réprimée dans le sang en 1595 à la bataille de Saint-Crépin. Jean Châtel tente d'assassiner le roi en 1594. Dans ce contexte, les choses semble aller mal pour le roi mais le 5 juin 1595, à Fontaine-Française, sa victoire sur la Ligue marque la fin de la guerre.
Ainsi donc, en 1595, il peu s'attaquer aux Espagnols de front et leur déclare la guerre officiellement. Elle commence mal pour la France qui perd Amiens et voit la Bretagne être envahie. Finalement, le 13 avril 1598, devant la hargne des alliés protestants, Henri IV ratifie l'édit de Nantes puis, le 2 mai, il signe la paix de Vervins avec l'Espagne. C'est d'ailleurs la dernière paix signé au nom du grand roi Philippe II qui meurt en septembre de la même année remplacé par Philippe III.
En 1599, Gabrielle d'Estrées meurt mystèrieusement alors qu'elle est enceinte de quatre mois et que le roi envisage sérieusement de l'épouser. D'ailleurs, le mariage est prévu le 10 avril et la “future” meurt dans la nuit. De suite, certains pensent que Sébastien Zamet, chez qui elle a dîner la veille, l'a empoisonnée. Le roi ne fut-il pas prévenu de sa mort seize heures avant qu'elle ne commence sa longue et horrible agonie.
Finalement, il répudie Marguerite de Valois et épouse Marie de Médicis en 1600 en la ville de Lyon. Née en 1575, elle appartient à la plus puissante et la plus riche famille de Florence. Son père, François Ier de Médicis, est porté sur l'art et les choses de la raison. Sa mère, Jeanne d'Autriche, délaissée par son mari mourra en couche en 1578. François se remarie avec sa maîtresse, Bianca Capello, dont Allessandro Allori a réalisé un joli portrait (ci-contre).
L'oncle de Marie, Ferdinand, devient grand-duc de Toscane en 1587 après la mort de François et de Bianco de la malaria. Cette mort a suscité un vif débat dans la communauté scientifique au cours dans la deuxième moitié des années 2000. En effet, en 2007, une equipe de toxicologues avance l'hypothèse d'un empoisonnement à l'arsenic alors que, en 2010, une autre équipe de médecine légale prouve que le couple est mort de la malaria, forme aigüe de paludisme.
C'est dans ce contexte qu'elle est éduquée au Palais Pitti. Elle a vingt-cinq ans en 1600 et on l'a dit belle pour l'époque malgré son embonpoint. Elle apporte, en dot, 2 millions de livre (7,2 millions d'euros) qui permit de combler le déficit de la France. Seulement, depuis la fin de l'année 1599, Henri IV a une jeune et belle maîtresse de vingt ans, la marquise de Verneuil, Henriette d'Entragues. Pour la nouvelle reine voilà une concurrente redoutable.
Marie de Médicis
Celle-ci a eut un fils du roi le 27 octobre 1601, Gaston-Henri. Presque au même moment la reine Marie donne naissance au dauphin Louis le 27 septembre 1601. Gaston-Henri deviendra évêque de Metz en 1612 avec une pension de 10 000 livres (environ 35 000 euros). Le roi se signe la paix avec le duc de Savoie et finit par se réconcilier avec le duc de Lorraine, Charles, celui qui fut le “seigneur” de mes ancêtres, cordiers à Saint-Diè dans les Vosges.
La dette publique, d'après Lucien Bély, est alors de 200 millions de livres en 1596 (soit près de 700 millions d'euros) alors que les recettes sont seulement de 10 millions (soit 35 millions d'euros) et les dépenses de 16 millions (soit 56 millions d'euros). Le mariage et la dot qui va avec est pour Sully un soulagement. Celui-ci permettra de renflouer les caisses de l'état avec 30 millions de livres d'arriérés fiscaux (100 millions d'euros). Déjà, on jouait avec de grosses sommes d'argent.
À titre comparatif, la dette publique de la France est 1 596 milliards d'euros (soit 456 milliards de livres). Les recette sont de 1 200 milliard d'euros et les dépenses de 1 400 milliard soit 200 millions d'euros de déficit. Aujourd'hui, le président de la république touche 27 000 euros par mois (soit environ 7 700 livres) alors qu'un maire touche la même chose en une année. Un fonctionnaire moyen touche, en 2011, environ 30 000 euros par an (soit 8 500 livres).
Dans les campagnes, la vie est moins facile au XVIIe siècle. On trouve la figure emblématique du “laboureur” mais il y a aussi la flotille des journaliers et des artisans. Un petit exploitant possédait en moyenne 10 ha alors qu'un laboureur possesseur d'une charrue en avait 20 à 30. Le fermier (ou marchand-laboureur) est le plus riche et le plus éduqué de tous. Il sait lire et écrire et peut parfois même acheter une seigneurie ecclésiastique.
La présence de Dieu était partout pour ces hommes du XVIIe siècle. La prière avaint une place importante et le Salut dans l'Au-delà presque une obsession. Pour autant, il ne fallait pas se plaindre, subir son sort sans broncher, montrer, même devenu vieux, que l'on était encore vaillant. L'honneur pour les garçons et la vertu pour les filles restaient des valeurs importantes. Souvent, le père de famille était autoritaire et brutal tandis que la mère éduquait les enfants.
Il ne faut pas oublier que nous sortons d'un siècle de tensions religieuses et que Henri IV en a indirectement payé les frais. Ravaillac aurait tué le roi parce qu'il le prenait pour un tyran. Depuis peu, l'idée que tuer un tyran mène directement au Paradis, fait son chemin. Henri IV est le type idéal à “trucider”. Ravaillac pensait faire le bien, il fut hué par le peuple de Paris qui assista au supplice affreux du jeune rouquin.
La thèse du complot fut brillament mise au jour par Christian Petitfils dans un de ses dernier livre, L'assassinat d'Henri IV (2009). Ravaillac aurait été manipulé par des nobles hollandais. D'ailleurs, lors de l'assassinat, la présence de cavaliers en arme ne sembla troubler l'assistance. Ils tentèrent en effet de tuer Ravaillac. Pour venir en aide au roi ou pour qu'il ne parle pas ? Du reste il dira toujours avoir agi seul... Il a tué sans se poser de question.