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19 février 2011 6 19 /02 /février /2011 12:20

Une étude sociologique de Mariagela Roselli et Marc Perrenoud, Du lecteur à l’usager, a été publiée en 2010 aux Presses universitaires du Mirail. La recherche qu’ils ont mené porte sur les comportements des étudiants d’une B.U (Bibliothèque Universitaire) de Toulouse.


Les trois axes de recherche sont : 1/Qui fréquente la B.U ? 2/Quelles sont les relations des usagers à la B.U et aux dispositifs de recherche et de documentation ? 3/Que font les usagers dans les espaces consacrés à la recherche et à la lecture ?

 

En quelque sorte, les auteurs mettent en place une sociologie des usages et des pratiques. Ce que je trouve intéressant dans leur démarche c’est ce questionnement sur l’appropriation de l’espace, des dispositifs de lecture, des supports, etc, mis à disposition des usagers.

 

Il y a toutefois des limites, comme le fait de comptabiliser, comme usager fréquentant la B.U, tous ceux dont la carte a enregistré l’emprunt d’un livre au moins. Or, il y a les usagers qui utilisent l’espace sans jamais en emprunter un seul, les « séjourneurs », et ceux qui en empruntent plus que régulièrement.  

 

L’enquête sur le terrain a duré 18 mois, soit environ 200 heures, avec 60 entretiens d’usagers réalisés. L’objectif de tout cela était de repérer les différents styles d’usage de la B.U, « d’appréhender le processus de façonnement, d’adaptation et d’adoption des supports et des dispositifs par les usagers » (p.36).

 

Les auteurs ont finalement mis au jour, si l’on peut dire, cinq catégories :

-      Les « usagers de la B.U comme salle d’étude » : les étudiants travaillent à partir de supports importés et n’utilisent que très rarement la B.U.

-      Les « errants de l’université de masse » : les « apprentis » et les « touristes », c’est-à-dire ceux n’étant pas préparés au travail universitaire et autonome. Leur attitude relâchée – « allez surfer sur Internet pour passer le temps » - est souvent jugée provocante par l’équipe de la B.U.

-      Les « usagers de bonne volonté » : ceux qui, n’étant pas non plus préparés au travail universitaire, s’investissent en demandant des conseils aux personnels, etc, afin de « s’accrocher ».

-      Les « internautes » : ce sont ceux qui ont une pratique mixte et qui désoriente le plus souvent le personnel. Il est difficile de faire la distinction entre le travail de recherche et la fréquentation de site marchand ou à caractère marchand. Aujourd’hui, ce sont ceux que l’on voit avec leur PC Portable ou leur Net Book.

-      Les « autonomes, des usagers critiques » : ils se divisent en trois sous catégories : les « experts formés à la recherche informatisée », les « sédentaires » et les « nomades pressés ». Cette catégorie met en évidence des étudiants assez présents à l’université qui entretiennent un rapport particulier aux livres. Ils fréquentent assidûment la B.U, ils sont présents en cours.

 

Cette enquête, bien au-delà de catégoriser les étudiants, permet une approche en sociologie de la lecture et en sociologie du travail scolaire et des étudiants. Elle permet aussi d’analyser le rapport des étudiants au livre, les mutations du public étudiant (avec les « internautes »). Toutefois, certains reprochent à cette étude de n’être pas assez comparative et n’éclaire pas assez sur le rapport au savoir des étudiants en général.       

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29 janvier 2011 6 29 /01 /janvier /2011 18:06

La société française est en train de changer, c'est presque une certitude. Seulement, annoncer cela nécessite des preuves, des arguments. Je vais tenter d'en donner. Le changement social est un objet de la sociologie qui n'a pas encore convaincu tous les chercheurs. Il apparaît d'abord que le changement social est une transformation sur le long terme, dans la longue durée pour citer Braudel. En fait, notamment aujourd'hui, le changement social est plutôt abordé dans le court ou moyen terme, soit le temps court de Braudel.

 

Pour commencer, il ne faut pas confondre le changement social avec l'évènement social. Celui-ci est une manifestation, une grève, un débat dans une assemblée... Quels effets ont ces évènements sociaux ? Parsons distingue le changement d'équilibre (= un nouvel équilibre remplace l'ancien sans que les caractéristiques du système global ne soient modifiées) et le changement de structure (= relève du changement social caractérisé par trois dimensions : 1/il est repérable dans le temps ; 2/ il est durable ; 3/il est le produit d'un phénomène collectif).

 

Pour décrire le changement social nous pouvons poser trois questions : qu'est-ce qui change ? Comment s'opère le changement ? Quel est le rythme du changement ? Pour l'expliquer nous pouvons poser deux questions : quels sont les facteurs expliquant le changement ? Quesl sont les agents actifs du changement ? Il y a donc une différence faite entre les facteurs du changement et les agents du changement.

 

En France, la population augmente. Pourquoi ? Parce que les gens font plus d'enfants... oui, mais ce n'est pas suffisant comme explication. Cela traduit-il un changement des mentalités ? On sait que souvent la hausse de la population est liée à une perception négative du niveau de vie. Je m'explique : la population française a globalement conscience d'une régression sociale, d'une baisse du pouvoir d'achat et aurait donc conscience de vivre moins bien que ces aînés. Les nouvelles technologies, et notamment Internet, on permis de grandes révolutions sociales dont l'exemple le plus récent est la Tunisie. Grâce au soutient de la communauté internationale via Internet, le gouvernement de Ben Ali – certes avec des morts – est tombé. L'Égypte amorce le même mouvement.

 

En France, facebook, par exemple, modifie les représentations que l'on se fait de la société. Elle devient plus “virtuelle” que concrète. Comment les français se représentent-ils ? Quels sont leurs attitudes vis-à-vis d'eux-mêmes et des autres ? On note chez les jeunes une nouvelle prise de conscience du rôle qu'ils peuvent jouer. En 2006, ils ont presque remporté une victoire. Leur implication dans les mouvements sociaux de 2010 renforce tout cela. Il faut ajouter les jeunes des “banlieues” en 2005 notamment.

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26 janvier 2011 3 26 /01 /janvier /2011 00:13

La sociologie française d'après guerre :

1945 : création de l'Institut National des Études Démographiques

1946 : création de l'Institut National de la Statistique et des Études économiques et du Centre d'Études Sociologiques.

 

Professeur à la Sorbonne à partir de 1925, Gurvitch (1894-1965) rencontre Halbwachs, Mauss et Lévy-Bruhl. Il créé, en 1946, le Centre d'Étude Sociologiques et fonde la revue intitulée Cahiers Internationaux de Sociologie. Sa carrière est toute tracée. Il est nommé à la chaire de Sociologie de la Sorbonne contre Aron et Stoetzel et devient directeur de l'EPHE. Il écrit en 1947 La sociologie au XXe siècle. Il sera critique du courant fonctionnaliste de Parsons. Il est connu pour sa sociologie de la connaissance (sujet qui m'intéresse). Il pense que toute connaissance doit être comprise en fonction de la réalité sociale. On connaît Les Cadres sociaux de la mémoire, et bien Gurvitch écrit un livre intitulé Les Cadres sociaux de la connaissance. Gurvitvtch n'est toutefois pas le plus connu.

 

Friedmann (1902-1977) l'est bien plus. C'est un normalien, agrégé de philosophie. Bref, il a le profil “classique” du sociologue du XIXe siècle. Il est influencé par la théorie marxiste et entre au Parti Communiste en 1928. Pourtant, dès 1936, il s'en écarte, plus sceptique sur Staline. Friedmann est surtout connu car considéré comme le Père de la sociologie française du travail. Ilanalyse, par exemple, la question de la qualification, mais aussi celle la guerre ou de la montée du nazisme en Europe... La question de la formation professionnelleest centrale dans ses travaux. Il va montrer que cette montée du taylorisme, de la parcellisation des tâches va entraîner la dégradation des métiers traditionnels et va aboutir à déqualifier le travail. Plus la formation est longue, selon lui, plus l'ouvrier va être qualifié, plus elle sera longue plus cela signifie qu'elle sera solide. L'activité intellectuelle s'en trouve alors réduite.

 

Ses travaux vont connaître une certaine postérité. La dé-qualification des uns va en fait entraîner la sur-qualification des autres. Braverman pense que c'est une manière, pour la direction d'une entreprise, de reprendre le contrôle de la production. De plus, deux autres sociologues, Schumann et Kern, montrent qu'il y a une re-qualification du travail ouvrier. Pour eux, la qualification est une variation autour d'une norme. C'est ce que l'on appel l'approche substantialiste. Friedmann, laisser l'Institut des Sciences Sociales du Travail et collabora avec Naville au Traité de Sociologie du travail(1961). Son étude Le travail en miettes, publiée en 1956, est une des plus connue de Friedmann. Il parle justement de la déqualification ouvrière dans cet ouvrage. Il reste pessimiste et parle, sans hésiter, de déshumanisation du travail. La thèse de Touraine sur les usines Renault en 1955 en est un héritage certain. Il y a un véritable courant sociologique qui étudie l'évolution du travail ouvrier.

 

En France, c'est aussi le moment Raymond Aron (1905-1983). Quoi que l'on en dise, son Introduction à la philosophie de l'histoire (1938) reste un outil largement abandonné par les historiens, mais fort utile et passionnant pour y puiser des idées. C'est un puit à idées si j'ose dire. En sociologie, il est aussi utile et La sociologie allemande contemporaine, publiée en 1935, m'a servi notamment pour comprendre Weber dont il est un des premiers à mettre en avant le philosophe allemand. Normalien et agrégé de philosophie, c'est un “classique” du XIXe siècle. Il voyage et enseigne en Allemagne ce qui va le pousser à faire connaître la sociologie d'outre-Rhin en France à la veille de la Seconde Guerre Mondiale. Il critique d'ailleurs le matérialisme historique comme le font Simmel et Weber. De plus, et assez logiquement,il s'oppose à Durkheim. Aron amorce donc une “rupture” avec la théorie holiste et déterministe. Il sera le professeur d'une grande génération d'étudiants, mais l'un fera plus tard parlé de lui : Pierre Bourdieu.

 

Aron sera un proche du Général pendant la guerre durant laquelle il fonde la revue La France libre. Il va s'intéresser au monde du travail en publiant en 1962 les Dix-huit leçons sur la société industrielle. Il y traite de beaucoup de sujet et relie souvent la sociologie à l'histoire. Est-il un sociologue historique ou socio-historien ? Je pose la question tout à fait sérieusement. Aron devient professeur au Collège de France et occupe la chaire de Sociologie de civilisation moderne. Il publiera aussi Les étapes de la pensée sociologique en 1967.

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13 janvier 2011 4 13 /01 /janvier /2011 20:45

Nous excluons donc entièrement de notre propos toutes les questions de cet ordre : quelle politique devons-nous faire ? ou encore : quels contenus devons-nous donner à notre propre activité politique ? En effet, ces questions n'ont aucun rapport avec le problème général que nous nous posons ici, à savoir : qu'est-ce que la vocation politique et quel sens peut-elle revêtir ? Maintenant, attaquons notre sujet.” 

 

Max Weber, Le savant et le politique, 1919

 

 

La vocation politique et le sens que l'on peut lui donner sont ce qui intéresse Weber. Aujourd'hui, force est de constater que les hommes politiques sont des professionnels, que beaucoup n'ont jamais donné un sens à leur action politique autre que celui qui dit : "Je fais de la politique parce que je veux servir mon pays et aider mes concitoyens". L'autre a donc une place, mais que signifie "servir son pays" et ses "concitoyens" ?

 

La plupart du temps, je vais être d'une sévérité volontaire, c'est le secteur économique et militaire que les hommes politiques soutiennent en premier. Les Tudors en Angleterre ont été très restrictif à ce sujet. Les monopoles commerciaux datent du XVIIe siècle, voire déjà du XVIe. D'ailleurs, si on s'intéresse au livre de Weber L'éthique protestante et l'esprit du capitalisme (1905), on s'aperçoit que ce dernier apparaît pleinement aux Temps Modernes et plutôt dans les pays Protestants.

 

La Réforme anglicane a repris des idées venus des états allemands ayant épousés les idées d'un certains Luther. Le sens commun, toutefois, veut que ces idées soit anglaise. Pourquoi le capitalisme est-il si ancré aux États-Unis d'Amérique ? Pour les mêmes raisons. Les puritains ont été envoyés là-bas par les Tudors pour des raisons politiques, mais ils ne sont pas parti sans héritage intellectuel.

 

L'individu est motivé par la tradition, par les habitudes et donc ces actions reposent sur ce ferment qui est généralement rationnel et réfléchi. Mais, c'est observable également, combien d'entre nous n'ont pas réagi "bizarrement" sous le coup de l'émotion ou de la passion. Une crise de jalousie amoureuse peut être violente ou la peur d'une mère devant son enfant qui traverse inconsciemment la rue se traduit souvent par une remontrance.

 

Ces types d'actions-là son humaine, "naturellement" humaine... Ces types d'actions peuvent être ramené à certains comportements de mammifères. L'éléphant, par exemple, agi beacoup en fonction des habitudes. Une matriarche transmet à sa "remplaçante" le parcours qu'elle a fait suivre toute sa vie aux siens (avec les points d'eau, les zones abondantes de nourritures...) Les éléphants pleurent leur mort et défendront le cadavre d'un des leur des prédateurs (même si celui-ci n'appartient pas à leur groupe).

 

Bref, continuons... Le choix de l'objectif de nos actions est le plus souvent déterminés en fonction de notre système de valeurs. Généralement, le plus inconscient possible, lorsqu'un choix s'offre à nous, on compare les coûts et les avantages afin d'optimiser au mieux notre décision. L'individu compare donc les fins et les moyens avant d'agir.

 

"Je veux faire passer cette foutue constitution" pense Sarkozy, "comment faire ?". Intelligent (enfin si ce mot peut s'appliquer à la politique), il a préféré la voie parlementaire à celle populaire. Finalement, il a analysé les conséquence de son action. Le référundum je suis sûr de rien ; le parlement, je me mets l'opinion à dos, mais le texte passe.

 

C'est de l'uchronie à l'envers que nous propose ici Weber. Que se passera-t-il si... ? Cela suppose de prendre en compte les rationnalités différentes de chacun. Aucun individu, en  politique particulèrement, n'a la même vision du monde, des choses... On entre alors dans le vaste domaine de la relation sociale, c'est-à-dire la rencontre entre diverses actions sociales.

 

Il n'y a pas de condition pour entrer dans le jeu social dans un type de relation ouverte. C'est le cadre de la vie quotienne, des rapports avec son boulanger, son coiffeur... Le rapport est souvent informel, rapide, basé sur la réciprocité, sur les habitudes et sur la tradion. "Ah oui, ce monsieur vient chercher son pain ici depuis quinze ans" dit la boulangère à une dame intriguée "Eh bien, dites moi, il est pas très poli", "Oh vous savez c'est un brave homme qui a toujours attendu son tour et n'a jamais fait d'histoire pour payer".

 

À l'inverse, il y a le lot des relations sociales closes. Il y a des conditions pour entrer dans le jeu social. Pour moi, je devais avoir mon baccalauréat pour entrer dans le jeu social complexe de l'université française. L'entrée dans des organisations comme la Franc-Maçonnerie par exemple, réponde à cette relation sociale close. Il y a d'autre types de relation sociale. Une relation sociale éphémère est par exemple faire l'amour (l'exemple n'est pas de moi). Toute institution, en revanche, en principe, établie avec autrui une relation de type durable. L'État en est une.

 

Des types de relations sociales plus quotidienne sont celles entretenue avec nos voisins, avec les membres de notre quartier, de notre village... Elles reposent souvent (mais hélàs de moins en moins) sur la concorde et l'harmonie, la sympathie. Enfin, arrive ce que Weber appelle la relation sociale de société. La politique peut rentrer ici. C'est une relation qui repose sur les intérêts.

 

En guise de conclusion, posons-nous la question suivante : comment comprendre l'action sociale ?

 

Il faut commencer par comprendre le comportement d'un autrui singulier, c'est-à-dire d'un tel dans tel contexte avec telles possibilités. Cela, par exemple, pourrait nous faire demander : pourquoi certains français n'ont pas pris les armes contre l'occupant allemand  ? Il ne suffit pas de dire que ce sont des laĉhes si l'on a pas étudié en détail l'atmosphère quotidien, les possibilités réelles d'actions...

 

Ensuite, essayer de comprendre le comportement général d'une personne en tentant, par exemple, de saisir sa personnalité, l'effet qu'il nous renvoie et renvoie aux autres. Nous sommes presque ici dans de la psychologie, mais cela reste une donnée sociologique fort intéressante. Pour l'historien, ce genre de questionnement peut aussi permettre de voir autrement certains comportement que l'on refoule instinctivement du fait de nos idéaux-types.

 

Enfin, justement, il convient de comprendre, par exemple le capitalisme, par la construction d'idéaux-types, qui, s'ils nous donne une image du capitaliste type, peuvent nous permettre de saisir les différences de tels ou tels patrons, peut-être même nous permettre de saisir les changements en train de s'amorcer. Cette vision des choses de la part de Weber est très ambitieuse et je la trouve remarquablement flexible, utilise dans de nombreuses situations.

 

En effet, ce type de théorie de la compréhension de l'action sociale est avant tout intellectuel : on cherche les motivations actuels de l'acte puis on cherche les motivations profondes de ce même acte.     

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12 janvier 2011 3 12 /01 /janvier /2011 22:51

L'historien est un chercheur, c'est chose entendu, qui a des valeurs. Il travail sur des faits. Faits qu'il doit sélectionner en fonction de ses propres valeurs mais, surtout, en fonction de celles des individus étudiés. Cette sélection des faits doit être capable de déconcerter le sens commun de l'opinion. Certains faits – comme mai 68 ou la chute du mur de Berlin – sont célèbres.

 

Un historien qui défendrait la création du mur et qui démontrerait que sa « chute » n'est qu'un fait mineur déconcerterais le monde des historiens dans le mauvais sens (il se ferait copieusement allumer je pense). Max Weber, grand sociologue s'il en est, est nominaliste. Le chercheur choisi de définir un phénomène de telle ou telle manière. Le choix est rationnel et volontaire. Sa démarche met en avant l'idéal-type.

 

C'est une sorte de tableau dans lequel le but est de gommer les contradictions possibles. Ainsi, Weber distingue un avant-plan, un arrière-plan et enfin les éléments qui sont négligés, grossi ou même totalement occultés. Finalement, l'idéal-type est une sorte de construction de phénomènes diffus que l'on va lier entre eux. Il n'y aura jamais, dans la réalité, un cas idéal, mais il la majorité des cas seront plus ou moins proche de l'idéal-type. Il peut, bien sûr, y avoir des analogies entre deux idéal-types.

 

Un individu se fixe des buts et cherche à donner un sens à son action. Celle-ci peut être intérieure ou extérieure. En effet, elle n'est pas forcément un comportement actif. Il y a des omissions, des abstentions, une certaine tolérance à l'égard de ce que l'on dit ou ne dit pas, de ce que l'on fait ou ne fait pas. « Ne rien faire, c'est agir ». Il faut donc prendre en compte le sens  que l'individu donne à son action. L'action sociale, pour prendre un exemple, a un sens orienté par rapport à autrui. Ce mot « autrui » est très important.

 

Il peut s'adresser à un autrui singulier (un syndicaliste s'en prend à un policier : relation de face-à-face). Il peut aussi s'adresser à un autrui collectif (le groupe de manifestant par exemple). Enfin, il peut s'adresser à un autrui indistinct, c'est-à-dire que l'on méconnaît les membres (l'Élysée a fait un communiquer annonçant des heurts de la police avec les manifestants : l'Élysée n'est pas un membre, il cache un groupe, qui, lui, est composé de membres). S'orienter vers autrui, vers l'autre, ce n'est pas s'orienter vers un objet matériel. Il y a l'idée que le comportement de chacun n'est pas orienté, mais qu'il est involontaire et imprévisible.

 

La suite au prochain épisode...

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30 septembre 2010 4 30 /09 /septembre /2010 21:00

L'homme

 

baechler.jpgJean Baechler est né en 1937. Historien de formation, docteur ès Lettres, il sera enseignant dans le secondaire puis à la Sorbonne. Chargé de conférence de sociologie à l'EHESS, chargé de séminaire dans plusieurs universités parisiennes , il devient finalement professeur de sociologie historique à la Sorbonne. Il évolue aussi au CNRS où il monte les échelons. Il va collaborer à de nombreuses revue, notamment L'Année sociologique et cela depuis 1987.

 

Il s'intéresse aux phénomènes révolutionnaires, puis au capitalisme, publiant dans la foulée Les suicides (1975), avant d'en arriver à la notion "d'idéologie" puis à la démocratie (voir son livre - un pavé de 700 pages - Démocraties publié en 85). Après une longue parenthèse anthropologique, il en revient au travail de ces dernières années, qui forme une sorte de tout cohérent.

 

Bibliographie (dix dernières années)

 

- Nature et Histoire (2000)

- Esquisse d'une histoire universelle (2002)

- Les morphologies sociales (2005)

- Agir, faire, connaître (2008)

- Les matrices culturelles (2009)

- La nature humaine (2009)

 

Ses recherches récentes

 

Les ouvrages marqués du signe dans la bibliographie forment une suite dans laquelle il essaie de répondre à la question suivante : comment fonder une étude du règne humain ? C'est un travail qui s'apparente à celui de l'anthropologue, et qui est fort proche de celui-ci. "L'hypothèse, nous dit-il, exige que soit clarifié deux concepts : celui de civilisation et celui de matrice culturelle."

 

Baechler pense que le propre de la nature humaine est d'être virtuel. Nous devenons en fait humain dans des cercles culturels de tailles variables. La langue est programmé en nous car nous sommes fait pour parler. Seulement, pour parler, il faut un apprentissage. Notre auteur le rappel par ailleurs : nous ne sommes pas prédisposé à apprendre telle ou telle langue.

 

a) Nature et culture.

 

L'un ne va pas sans l'autre et nous avons en fait trois notions : culture, civilisation et matrice (=aire) culturelle. Baechler note qu'il y a des cercles culturels de dimensions très variables que l'on peut distribuer entre :

               -> des cultures "primitives"  : cercle étroit de 500 à 1000 individus et dont la vie historique est courte.

               -> les civilisations : celle chinoise par exemple ; vaste territoire et durée de vie d'à peu près 5 000 ans.

 

Il y a des milliers et des milliers de cultures mais un nombre fort limité de civilisations Baechler nous dis entre 5 (parfois 7) que sont les civilisations indienne, européenne (ou occidentale), amérique précolombienne, africaine et chinoise).

 

La civilisation européenne, par exemple, a eu un développement particulier et inédit dans l'espèce humaine. Il y a en effet un bouleversement de la condition humaine elle-même. Mais il semble que les productions culturelles aient été affecté en profondeur.

 

b) Les matrices

 

Baechler distingue trois ensembles culturels :

 

               - la matrice primitive : sociétés "primitives" (l'échelle est locale)

               - la matrice traditionnelle : elle apparaît dix mille ans plus tard ; ce sont les grandes civilisations (l'échelle est continentale)

               - la matrice moderne : c'est la modernité (l'échelle est planétaire)

 

=> Il y a un changement d'échelle au fur et à mesure du temps. Une matrice en remplace intégralement une autre.

 

c) L'espèce humaine

 

L'espèce humaine est une espèce comme une autre, mais elle est libre quant à son code génétique. Un lion se comporte en lion. Il y a une programmation génétique. Baechler note, et j'ai trouvé cela étonnant, que les corbeaux adultes apprennent aux petits corbeaux à devenir corbeaux... Mais, même s'il y a apprentissage, cela se retrouve dans des marges et des proportions très réduites.

 

Dans l'espèce humaine, nous avons à devenir humain, chaque enfant doit apprendre à le devenir. Comme il y a plusieurs manières de devenir humain, c'est un nouveau problème qui se pose. C'est là qu'intervient la question fort philisophique et quelque peu kantienne : qu'est-ce qu'être humain ? En effet, il y a une diversité culturelle au sein de l'espèce. Par exemple, nous résolvons nos problèmes en nous donnant des buts à poursuivre.

 

=> Baechler en vient à dire que nous sommes une espèce libre, finalisée, rationnelle, mais faillible. Ce sont là, d'après notre auteur, les quatre caractères de l'espèce humaine.

 

d) La modernité

 

Qu'est-ce que la modernité ? En fait, c'est une hypothèse. D'après Baechler, qui s'appuie sur tout un tas d'analyse et de travaux, nous notons qu'il se passe quelque chose d'inédit depuis le XIVe siècle en Europe :

 

               - développement de la science

               - théorisation de la démocratie moderne

               - l'individuation

               - différenciation des ordres (qui fonctionne mal)

              - développement économique (conséquence des quatres points précédents)

 

En fait, nous assistons à un développement interne de la civilisation européenne. C'est le début d'un monde neuf, ou tout le monde est heureux (en oppostion aux catastrophes du moyen âge). (1) Ce phénomène est donc strictement européen à l'origine et il c'est imposée peu à peu à toute la planète. C'est encore le cas aujourd'hui. (2) De plus, il y a un nouveau déloppement interne à cette nouvelle civilisation européenne qui va déboucher sur une autre civilisation : celle américaine est emblématique. (3) Finalement, la modernisation est l'analogue de la néolithisation car elle met en place un nouveau champ de possibles culturels.

 

Dans le futur, bien sûr : 1/ nous ne savons pas comment la modernité va évoluer ; 2/ nous  ne sommes pas dans une période de décadence, mais dans une phase de changement de matrice.

 

Conclusion

 

L'espèce humaine est débrouillarde et ses représentant très très mal. Cela signifie qu'à l'échelle de la décennie nous trouvons la fureur, le meurtre et la bêtise ; à l'échelle du siècle, il se dégage déjà un sens ; à l'échelle du millénaire, l'espèce est admirable.

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26 septembre 2010 7 26 /09 /septembre /2010 23:40

La sociologie, « fille des Révolutions »

 

     La sociologie naît avec la modernité, avec l'interrogation de la société sur elle-même. C'est un peu la réponse à la question : comment fonctionne la société ? Cette réflexion, au départ plus philosophique que sociologique, émerge à un moment donné de l'histoire. Ce moment, c'est la Révolution française. Cette naissance un peu agitée valu à la discipline d'être surnommée « la fille des Révolutions ». Nous assistons à l'abolition du système féodal et l'affirmation, il est vraie toute symbolique : « les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droit ». Ce sont les idées d'égalité et de liberté qui font la une. Finalement, ce qui est le plus important, c'est que l'homme est au centre de la société et celle-ci il devient possible de la faire évoluer, avancer et organiser. De cette « révolution » sociale, intellectuelle aussi, naît une fascination pour cette Révolution française pourtant si critiquable : les historiens, les écrivains, les dramaturges, les poètes et les hommes politiques écrivent et débattent sur elle. C'est toute la société d'Ancien Régime qui vole en éclat et ne sera définitivement enterrée qu'en 1875 avec la promulgation des lois Wallon. Le phénomène, centré souvent sur la France, unique responsable de la situation politique pour beaucoup, est en fait européen. L'aristocratie traditionnelle laisse la place à la haute bourgeoisie industrielle et commerçante. Une certaine instabilité politique va s'installer en Europe et le mouvement de 1848 est là pour le rappeler. C'est l'année, n'oublions pas, de la publication du Manifeste du parti communiste. Ce sont les mentalités qui évoluent et les individus, tout en délaissant l'Église, modifient leur regard sur la société dans laquelle ils vivent.

     Le second phénomène, qui suit de près le premier, et même le précède d'une certaine manière, c'est la Révolution industrielle. Il y a un bouleversement considérable à l'échelle humaine. En un demi-siècle, les techniques de productions ont été bouleversée, les circuits économiques ce sont développés, les structures sociales ce sont émancipés et le rapport de l'homme au monde va radicalement changer. Avec la colonisation, l'homme n'a plus une vision européenne des choses, mais internationales. Cela donne l'impression aux contemporains que l'humanité est capable de dominer la nature afin de la domestiquer et d'en tirer encore plus de richesses. Le problème, c'est que tout cela à un coût. Le capitalisme ce fait oppressant et les inégalités qu'il génère sont vivement combattus par un petit groupe d'intellectuels et de révolutionnaires. Marx et Engels en Allemagne font office de leaders, de maîtres à penser. Si l'industrialisation fragile les anciens équilibres sociaux et remet en cause la tradition catholique. Les paysans ne trouvent plus de travail et sont poussés vers les villes. Souvent, déjà au XIXe siècle, le nombre des sans emplois augmentent de façon dramatique pour l'époque. Une nouvelle forme de société apparaît, une nouvelle conscience sociale en quelque sorte, voit le jour en Europe. La société est organisée en deux classes sociales : la bourgeoisie et le prolétariat. Dans la première classe se trouvent les rentier, les banquiers et les commerçants. Ce qui uni les membres de cette classe, c'est une manière de vivre. Elle est économe, elle épargne et elle constitue une dot pour ses filles. Dans la seconde classe, la réalité est tout autre. Se trouvent en son sein les ouvriers, les pauvres et les démunis. Ce sont un peu ces gens dépeints par Hugo dans Les misérables. Leur quotidien n'était point rose : l'homme travaillait trois cents jours par an, la femme presque deux cents jours, les enfants environ deux cent soixante jours.

 

Un nouvel antagonisme de classe

 

     Ce qui est aussi une marque de cette société c'est le manque de considération de la classe des ouvriers. La pauvreté de ces gens est considérée comme étant une maladie par les autorités de l'époque, qu'elles soient politiques ou sanitaires. Vivre dans ce monde en mutation n'a plus aucun sens pour beaucoup d'individus. Ce qu'il faut donc c'est recréer un lien social qui a été fragilisée, sinon presque détruit, par les mutations antérieures. Marx est un philosophe de formation, adepte de Hegel et de Feuerbach, il sera critique envers eux. Il démontera également la pensée de Proudhon, « père » de l'anarchisme à la française, dans son fameux livre la Misère de la philosophie (1847). Il est animé par le désir de comprendre la société et par celui de la transformer. Surtout, et c’est important, il veut comprendre scientifiquement la société. En cela, Marx se détache des socialistes utopiques (Saint-Simon, Fourier, Owen). Marx reprend le combat de Feuerbach contre Dieu et la religion. Pour lui, la vraie réalité n’est pas celle de l’esprit, mais c’est la réalité matérielle, sociale et économique. Dans une société, et c’est une loi universelle, il faut des règles et il faut respecter les règles.

     Marx pense, comme Kant, qu’il ne faut pas imposer à un peuple une façon d’être heureux. Il faut mettre en place des lois qui doivent satisfaire tout le monde mais qui ne vont certainement pas satisfaire tout le monde. C’est donc à partir d’un problème philosophique, et même déjà très politique, que Marx va construire sa pensée. Ce qu'il recherche, c’est l’abolition des classes sociales. Il ne parle de lutte des classes simplement pour faire bien. Ce qu’il aimerait voire se réaliser, c’est une égalité parfaite entre les individus. Pour Marx, l’histoire de toute société c’est l’histoire de la lutte des classes dont la finalité sera le communisme. Finalement, le communisme c’est une société nouvelle, c’est une conception originale de l’ordre du monde, dans laquelle le prolétariat, après avoir fait la révolution, prends le pouvoir. Le Manifeste, rédigé en collaboration avec Engels, pose donc assez clairement l’antagonisme de classe prolétariat contre bourgeoisie. C'est une vision du monde qui repose sur la mise en avant de tout ce qui est matériel. C'est le matérialisme.

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15 septembre 2010 3 15 /09 /septembre /2010 01:40

Source : LEVY-BRUHL (Lucien), L'âme primitive, Paris, Presses Universitaire de France, 1996 [1927], "Quadrige", chap. II, p. 176 à 184.

 

Lévy-Bruhl s'appuie sur les travaux d'Elson Best, The Maori. Le wairua, chez les Maori, c'est l'âme ou l'esprit de l'homme. Il revêt deux aspects en apparence contradictoire. "C'est une qualité immatérielle qui survit au corps, et cependant on nous dit aussi que certaines pratiques magiques étaient employées pour détruire les wairua des ennemis, et causer ainsi la mort de support physique." (Lévy-Bruhl, p.177) Lorsqu'une personne rêve d'un endroit lointain, c'est son âme qui y a été transporté. Le wairua quiite le corps à la mort.

 

"Le mauri est un principe qui ne peut pas ainsi quitter le corps vivant." Là-encore, seule la mort le libère. C'est lui qui mesure et tempère les émotions primaires comme la haine,  la joie, la colère, la jalousie ou la peine... Le mauri est trois choses :

 

  1. 1) Une activité en nous.
  2. 2) Un principe physique de vie active ou un principe de vie tapu (=sacré), c'est-à-dire mauri ora.
  3. 3) Le mauri matériel, c'est-à-dire le talisman, un objet protecteur. Il faut faire entrer un dieu dans l'objet de l'intermédiaire du mana.

On peut faire, ici, le rapproche avec Halbwachs et son principe de mémoire culturelle (Halbwachs ). Lorsque le christianisme est arrivé chez les Maori, le mauri a été, d'après les Anciens, souillé et de nombreux malheurs se sont abbatus sur leur peuple.

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29 août 2010 7 29 /08 /août /2010 03:31

Cet article est extrait de mes cours de sociologie de l'année universitaire qui c'est achevée début juin 2010. Je m'excuse auprès des lecteurs si le niveau paraît élevé. Bien sûr, j'accepte les questions pour ceux qui en auraient. 

 


 

Il est élève de l’Ecole Normale Supérieure dont il sort agrégé de philosophie. Il devient enseignant, en France puis en Allemagne. Il va chercher à institutionnaliser la sociologie. Sa démarche, le holisme, va se mettre en place tout au long de sa carrière. Il s’intéresse au départ à la notion de solidarité dans sa thèse, De la division du travail social (1893). Sa démarche, qui est empirique, c’est-à-dire qu’elle repose sur l’expérience, se décompose en quatre étapes : définir, classer, expliquer et prouver.

 

L’idée principale de sa thèse est que l’évolution des sociétés modernes se caractérise par une division du travail de plus en plus poussée. Pour Durkheim, la division du travail n’est pas un obstacle à la solidarité. Sous l’influence du progrès, les sociétés passe d’un type de solidarité à un autre. Les sociétés à solidarité mécanique évolue ainsi vers des sociétés à solidarité organique.

 

Ø            Solidarité mécanique : Les individus diffèrent peu les uns des autres, adhèrent aux mêmes valeurs, mais ils reconnaissent le même sacré. La société paraît cohérente au premier abord. Les sociétés « primitives », sans écritures ou traditionnels, sont des sociétés à solidarité mécanique.

Ø            Solidarité organique : Ce sont les sociétés modernes. Les individus possèdent chacun une fonction sociale précise. La société apparaît comme étant moins cohérente qu’une société à solidarité mécanique.

 

Durkheim est surtout celui qui va donner une base théorique à la sociologie avec Les règles de la méthode sociologique (1895). Ce que l’on fait, ce que l’on pense, c’est un état de société. Dans son livre, il s’intéresse à la notion de fait social. Pour lui, le fait social est extérieur à l’individu et s’impose à nous de manière coercitive (implicite ou explicite).

 

La mode est-elle un fait social ? Elle est implicite, mais il n’y a pas de règle précise. L’individu peut-être déviant, mais cela à ses risques et périls. Il y a un risque de sanction social. Le fait social, pour Durkheim, est donc un objet propre aux sociologues. Ce n’est pas biologique ou psychologique.

 

Ce qui fait l’individu est un acte social. La société totalise des sentiments individuels. Il y a un très fort déterminisme chez Durkheim, et donc un fort holisme. Il faut faire la différence entre le normal et le pathologique. Il n’y a pas de société parfaite. Un autre livre suit de peu les règles de la méthode, et donne, si l’on veut, une illustration de la théorie. Il s’agit de son étude sur Le suicide (1897).

 

  

Le suicide (1897)

 

  

Mais qu’est-ce que le suicide ? Il s’agit de l’acte de désespoir d’une personne qui ne tient plus à vivre. En sociologie, il faut éviter le jugement de valeur, mais ici il doit partir de la pré-notion. Il s’agit de la pré-notion du désespoir, c’est-à-dire toute mort qui résulte médiatement ou immédiatement d’un acte positif ou négatif effectué par l’individu. Un acte positif ou négatif renvoie au juridique.

 

Un acte négatif, c’est le suicide par inaction, comme le refus de manger par exemple. Pour qu’il y ait suicide, il faut que la victime soit consciente de l’acte qu’elle commet, et il faut que l’acte se conclu par la mort de l’individu. Durkheim exclut de ce fait le suicide des animaux ou des fous.

 

Pour étudier le suicide, il va s’intéresser aux statistiques. Il ne veut pas savoir pourquoi les gens se suicide. Il écarte le psychologique et le collectif. Non. Il s’intéresse à la réussite de l’acte par l’individu en pleine connaissance de cause. Durkheim réfute les influences cosmiques, génétiques et climatiques.

 

Il utilise la notion de taux de suicide. Pour lui, il y a une différence de nature et non de degré entre deux suicides. Le suicide, c’est une réalité à part entière, c’est une réalité nouvelle. Le Tout n’est pas égal à la division des parties. D’une année sur l’autre, le taux de suicide reste stable. On peut prévoir le nombre de suicide. Ainsi, Durkheim peut affirmer que le suicide est un fait social.

 

Par quoi se caractérise-t-il ? Les hommes se suicide plus que les femmes, les vieux plus que les jeunes, le jour plus que la nuit, au printemps plus qu’en hiver, en ville plus que dans les campagnes*, etc. Les femmes se suicide moins grâce à la famille. Durkheim, pour l’explique, utilise la comparaison.

 

à Conclusion : Les enfants protègent du suicide, même si certaines personnes sont plus fragiles que d’autres. La famille, ou la perspective d’en fonder une, protège l’individu et plus particulièrement la femme. Les hommes pauvres se suicides moins que les hommes riches. Pour Durkheim, c’est l’idée que la pauvreté protège du suicide. Aujourd’hui, cela est démenti. Avant, les pauvres étaient plus solidaires entre eux et la pauvreté était moins stigmatisant.

 

Durkheim compare ensuite le taux de suicide au sein des trois religions monothéistes importantes à son époque : le catholicisme, le protestantisme et le judaïsme. Toutes, elles condamnent le suicide. Pourtant, les Juifs se suicide moins, les Protestants plus. Ce n’est pas le fait de changer une loi qui va améliorer le social. Durkheim constate simplement que les Juifs sont bien intégrés et donc ils se suicide moins.

  

Il y a deux thèmes qui ressortent de cette typologie : l’intégration ou le contrôle social par excès ou par défaut. Si par défaut, la société ne se contrôle pas assez, on constate une augmentation du taux de suicide.

 

  

Les formes élémentaires de la vie religieuse (1912)

 

  

Durkheim, qui s’intéresse aux travaux de Smith, écrit en 1912 Les formes élémentaires de la vie religieuse. Il n’accepte pas que la religion soit un ensemble de superstitions car elle repose sur des bases réelles. Pour lui, les représentations religieuses sont un type particulier de représentation collective.

 

Ce sont les Lumières écossaises qui influencent indirectement Durkheim. La religion, au XVIIIe siècle, est devenue un objet de curiosité et de questionnement. En tant que philosophe, Durkheim ne peut ignorer les débats qui ont eu lieu à l’époque. Descartes, Newton, Leibniz ou Spinoza ont donné leur interprétation de Dieu, ont cherché à lui trouver (ou non) une place.

 

Si Dieu n’est pas universel il n’est peut-être pas nécessaire. On ne remet pas en cause pour autant l’existence d’un Être supérieur. Durkheim, à son tour, ne remet pas en cause l’existence du sacré, mais il le ramène à ce qu’il est, c’est-à-dire un produit de la société.

 

Le sacré exprime symboliquement la société. L’hypothèse est forte. Pour le démontrer, il décide d’étudier l’élément le plus primitif, le plus simple et le plus ancien possible. Durkheim considère qu’il est plus simple d’étudier les traits fondamentaux de la religion. Il s’agit du totémisme chez les aborigènes d’Australie. Une religion, explique t-il, doit être claire, simple à la source, afin d’en tirer des traits généraux.

 

Il refuse de croire que la religion est un ensemble de phénomènes surnaturels. Les primitifs aborigènes ne pouvaient pas connaître un ordre naturel des choses puisqu’ils ne connaissaient pas la science. De ce fait, si l’on danse pour faire pleuvoir, on ne peut pas parler de quelque chose de surnaturel.

 

Pour Durkheim, on ne peut pas non plus centrer la religion sur un dieu, car il existe des religions sans dieux (le bouddhisme ou le judaïsme).

 

C’est dans l’opposition entre le sacré et le profane que l’on trouve la naissance du phénomène religieux. Croyances et pratiques unissent en une même communauté morale, tous ceux qui y adhèrent. Il se base sur deux critères :

Ø            Le sacré opposé au profane : «  Les choses sacrés sont des choses interdites, tenus à distance des choses profanes. Le sacré est inaccessible à l’être profane. » – Durkheim.

Ø            Existence d’une communauté appelée église : Durkheim insiste sur une foi qui doit rester commune, autour d’une force que les fidèles éprouvent au travers d’une expérience collective. Ce sont les pratiques régulières du culte.

 

Les aborigènes vivaient selon deux phases distinctes :

          

           1)à une phase de travail dite profane.

 

2)à une phase de fête (corrobori) pendant laquelle ils se retrouvent plusieurs jours de suite. L’effervescence collective apparaît et permet l’émergence de phénomènes nouveaux qui vont donner lieu au sacré.

 

Cette effervescence groupale, comme le dit Durkheim, peut se matérialiser dans un objet ou une personne. C’est cette force collective qui donne le totémisme. Le sacré est totalement séparé du profane. Même des phénomènes qui n’ont rien de religieux procèdent selon un processus identique. La Révolution française, par exemple, met en avant la patrie et sacralise la force du drapeau, symbole fédérateur. (à cf. Mauss et le Potlatch)

 

L’élément important, c’est donc  la communauté. Pour se rappeler, il faut que les individus mettent en place un certain nombres de rites. Ces rites permettent de rentrer en contact avec la divinité, cimentant ainsi le moral du groupe.

 

Il y a deux sorte de rites :

Ø            Les rites positifs (les fêtes ou les commémorations).

Ø            Les rites négatifs (un sacrifice par exemple).

à Il ne faut pas non plus manger, détruire certaines choses dites sacrés.

 

Durkheim nous explique que tout ce que nous connaissons procède du même processus, que ce soit dans le domaine du droit, de la religion, etc. Cette dualité entre sacré et profane est certes contraignante, mais elle est toutefois nécessaire. Durkheim montre même que la science a des origines religieuses. On a foi en la science comme on a foi en n’importe quoi d’autre.

 

L’idée de Durkheim est de créer une religion séculière, sans dieux. Pour avoir affirmer cela, il a été très vivement critiqué par la droite, par les conservateurs. Sa pensée a en effet des points faibles, mais pas celui-là. Il réduit la religion des aborigènes sans entrer dans sa complexité et sa distinction entre sacré et profane il semble la rattacher aux religions monothéistes, et donc non à toutes les religions. En cela, sa sociologie des religions est faible car elle passe à la trappe une bonne partie de l’histoire religieuse de l’humanité.



* Pour ce dernier cas, à partir de 1930, Halbwachs constate le contraire, et en 1997, Establet confirme l’analyse d’Halbwachs.

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